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20 juillet 2010 2 20 /07 /juillet /2010 15:27

 

 

 

 

1. Bès, une divinité aux nombreuses fonctions.

 

Bès est une divinité domestique apparue dès la plus haute antiquité égyptienne mais dont lapparence léonine ne rappelle en rien les traits habituels des dieux du panthéon égyptien. Il s’agit d’un dieu guerrier, et même un dieu de la Guerre, mais il patronne également les arts, notamment la danse. Comme on le représente de face, Bès fut assimilé à un « gardien du seuil », associé aux lieux de passage, et à un protecteur du foyer, et plus précisément des femmes en couches et des enfants. C’est par ses danses et ses grimaces, et au son d’instruments de musique magiques, que Bès écarte les êtres malfaisants et autres mauvais esprits susceptibles de s’en prendre aux femmes et aux enfants, particulièrement lors des accouchements. De manière plus générale, Bès a pour mission de tenir à distance les entités malfaisantes du monde sethien. (=Seth, frère d’Osiris et oncle d’Horus) réputées vivre sous la terre (on reconnaît là l’image traditionnelle, chère au christianisme, du Diable vivant dans les profondeurs de la terre) ou au plus profond du désert. Bès fut également invoqué pour les guérisons et, à lépoque ptolémaïque, il rendit également les oracles, dans le temple funéraire de Séti Ier, à Abydos. Un temple lui fut également dédié dans l’oasis de Bahariya. Vénéré jusqu’à la fin de l’époque pharaonique, Bès survécut même un temps au christianisme. Quant à l’islam, il fit de lui un démon hantant, le soir venu, les ruines de Karnak.

 

2. Visualisation et attributs.

 

Bès apparaît sous les traits dun être grotesque, petit et disgracieux, parfois coiffé dune couronne de plumes, le visage large et plat, le ventre proéminent, le sexe bien apparent son caractère ithyphallique apparaît dailleurs très clairement sur une petite statuette, célèbre à Ephèse, dans lactuelle Turquie- , et portant une barbe épaisse, ce visage nétant pas sans rappeler la gueule et la crinière du lion. Au Nouvel Empire (-1580 / -1090), on le représente doté dailes et à lépoque gréco-romaine, on le voit armé dune épée et dun bouclier. Il aurait emprunté son apparence léonine au génie Aha (=le Combattant) que lon trouve sur des ivoires en défense dhippopotame que lon offrait, en guise de protection, aux femmes qui venaient daccoucher. Cest de Aha aussi que semblent lui venir ses jambes fléchies qui rappellent les pattes de lanimal d’un lion dressé sur ses pattes postérieures. Ses oreilles arrondies évoquent également le lion. Son unique vêtement, à savoir une peau de léopard serrée autour des reins, dont la queue pend, à larrière, entre ses jambes, alors que la tête du félin repose sur sa poitrine, renforce encore cet aspect de fauve redoutable qui distingue Bès dans le panthéon égyptien. Cette peau de léopard a une valeur de protection et de conservation de la puissance sexuelle. Létrangeté de son apparence pouvait laisser croire en une origine africaine de cette divinité qui était supposée, selon la légende, avoir été rapportée de Nubie par une déesse dite la « déesse lointaine », elle même ramenée par lantique dieu Onouris, mais lhypothèse de lorigine africaine de Bès a finalement été écartée (on pensait aussi que laspect de Bès se référait aux Pygmées). On a représenté le dieu sur nombre dobjets usuels, ainsi que sur certains monuments et certains temples. Ses attributs habituels sont les couteaux ou les instruments de musique qui évoquent tant sa mission de protecteur que son rôle au cours des fêtes de la naissance. Toutefois, lattribut principal de Bès est la boucle Sa invoquée avec Thouéris, la déesse-hippopotame, pour favoriser les accouchements (à comparer au Têt, symbole lié à la déesse Isis et qui, devenu un hiéroglyphe, semble être la boucle dune ceinture, à savoir le principe féminin de la fécondité, souvent associé au pilier Djed, axe vertical reliant le monde céleste et le plan terrestre ; le Sa de Bès ne correspond cependant quà un symbolisme limité au plan terrestre).

 

Eric TIMMERMANS 

©

Bruxelles, le 20 juillet 2010.

 

 

Sources : Dictionnaire de mythologie et de symbolique égyptienne, Robert-Jacques Thibaud, Dervy, 1996 / Dictionnaire du Diable, Roland Villeneuve, Omnibus, 1998 / Dieux et déesses de lancienne Egypte, Bernard Van Rinsveld, Musées Royaux dArt et dHistoire (MRAH) de Bruxelles, 1994/ Dictionnaire historique de lEgypte, Pierre Norma, Maxi-Poche Références, 2003 / Grand dictionnaire des symboles et des mythes, Nadia Julien, Marabout, 1998 / LAnge déchu, M. Centini, Editions de Vecchi, 2004 / Petit dictionnaire des dieux égyptiens, Alain Blottière, Zulma, 2000.

 

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20 juillet 2010 2 20 /07 /juillet /2010 15:17

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20 juillet 2010 2 20 /07 /juillet /2010 15:15

 

 

 

 

 

1. Les Cabires, conducteurs du Sabbat ?

 

En 1846, labbé Migne écrit que les Cabires sont des démons et quautrefois ils présidaient à une sorte de Sabbat. On appelait ces orgies, « fête des Cabires » et elles ne se célébraient que la nuit. Linitié devait subir des épreuves effrayantes puis était ceint dune ceinture de pourpre et couronné de branches dolivier, suite à quoi on le faisait asseoir sur un trône illuminé, pour représenter le maître du Sabbat. Pendant ce temps, on exécutait autour de lui des danses plus ou moins « infâmes »...

 

2. Les Cabires, des divinités protectrices d’origine orientale.

 

Les Cabires sont, comme souvent, danciennes divinités païennes démonisées par le christianisme. Ce sont d’antiques divinités célestes, terrestres, maritimes ou infernales, vraisemblablement d’origine orientale. On suppose que les Cabires furent d’abord des génies de la Fertilité, avant de devenir des divinités protectrices. Ils étaient adorés en Egypte, où un temple leur était consacré à Memphis, de même qu’en Phénicie et en Asie mineure, où l’on prétendait qu’ils étaient au nombre de huit et qu’ils protégeaient tout particulièrement les navigateurs.

 

3. Les Cabires en Grèce.

 

En Grèce, où leur nom signifiait « Qui brûlent », on les disait fils de Zeus et de Calliope, Léda, Electre ou encore Perséphone. Mais la tradition la plus commune leur donne pour père Héphaïstos. Celui-ci leur aurait accordé des pouvoirs étendus sur les métaux et, dune manière plus générale, sur lélaboration des techniques de la métallurgie. Les Cabires étaient des divinités du feu très honorées à Lemnos, Imbros, Samothrace, en Béotie et à Thèbes au temps des Pélasges. Ils étaient invoqués pour veiller à la prospérité des champs et pour protéger les marins du naufrage. Certains les identifièrent aux grands dieux (Déméter, Hermès, Hadès, Perséphone, les Dioscures, voire Zeus lui-même), mais dautres ne virent en eux que des divinités inférieures (assimilées aux Titans, Corybantes, Curètes, Dactyles) symbolisant les forces souterraines de la Nature où se trouvent les métaux quils travaillent. Les Cabires avaient pour filles ou sœurs les Cabirides et on les célébrait à loccasion d’une fête du même nom qui durait neuf jours. Leur culte comportait des mystères pratiqués jusquen Etrurie, auxquels les aèdes de lAntiquité étaient initiés : Cadmos, Orphée, Philippe (le père dAlexandre) Certains considéraient les Cabires comme les prêtres de Déméter et de Perséphone qui sauvaient les marins lors des naufrages. Les Cabires, dont le culte remonte en Grèce à des temps archaïques, nen demeurent pas moins mystérieux. On ignore en effet tout de leurs caractères, de leurs origines et de leur nature.

 

4. Les Cabires à Rome.

 

A Rome, on adopta le culte des Cabires sans leur donner de nom, par superstition, leur accordant seulement la dénomination de dieux puissants –les Puissants- et en les associant à la triade formée par Jupiter, Minerve et Mercure. Les Romains ont vénéré les Cabires jusquau temps de Cicéron. Ils furent notamment identifiés aux Pénates.

 

5. Visualisation.

 

5.1. Une médaille de Trajan représente un Cabire coiffé dun bonnet pointu, tenant dans une main une branche de cyprès, emblème du monde de lau-delà.

 

5.2. Une monnaie de Thessalie montre un Cabire portant un manteau.

 

 

Eric TIMMERMANS

Bruxelles, le 20 juillet 2010.

 

 

Sources : Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Joël Schmidt, Larousse, 1965 / Dictionnaire du Diable, Roland Villeneuve, Omnibus, 1998 / Encyclopédie de la mythologie, Sequoia, 1962 / Grand dictionnaire des symboles et des mythes, Nadia Julien, Marabout, 1998.

 

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16 juillet 2010 5 16 /07 /juillet /2010 14:54

 

 

 

 

 

1. Bélénos : étymologie.

 

Le nom de Bélénos signifie peut-être « brillant », « éclatant » ou encore « resplendissant ». Létymologie du nom de ce dieu gaulois permet de rapprocher lélément bel de la racine indo-européenne guel (=briller), ce qui, selon les experts, serait un témoignage de son caractère solaire.

 

2. Bélénos, un aspect de lApollon celtique ?

 

César a assimilé Bélénos à un aspect de lApollon celtique, dieu solaire par excellence, mais également dieu médecin : « Apollinem morbos depellere » (=Ils les Gaulois- croient quApollon chasse les maladies). Bélénos est, de fait, un dieu guérisseur attaché aux eaux vivifiantes. Cest essentiellement un « donneur de vitalité et de santé ». Or, le culte de lApollon celtique est étroitement lié à celui des sources et des eaux vives et son histoire est à mettre en relation avec les yeux. Ainsi les sources sont-elles considérées comme des « yeux deau » en langues celtiques. Et la source auprès de laquelle est né lApollon celtique, fait exploser les yeux de ceux qui osent la regarder indûment. A linverse, ces eaux sacrées possèdent des vertus particulières pour la guérison des maux oculaires. En outre, dans les langues celtiques, le Soleil est nommé l « œil du créateur », ce qui semble convenir parfaitement à un dieu solaire tel quApollon-Bélénos. Ajoutons encore que lon peut, non-seulement, établir une relation avec le dieu irlandais Bel, dun point de vue étymologique, mais également avec les dieux, également irlandais, Diancecht, le dieu-médecin des Tuatha dé Danann, et Aonghus le Mac Oc (=le Jeune Fils). Bélénos, dieu solaire et dieu guérisseur, nest-il pas également nommé Iovantucaros (de « juvent », « jeunesse) et Iatromantis (Devin Médecin) ? Quoiquil en soit, en tant que dieu guérisseur, Bélénos apparaît comme une divinité de « troisième fonction productive ».

 

3. Saints Guidon et Willibrord, christianisations de lApollon celtique ?

 

Le culte de certains saints chrétiens est lié, lui aussi, aux eaux vives et aux soins des yeux. Ainsi leau que lon peut trouver dans la crypte dédiée à saint Willibrord, à Echternach (Grand-Duché de Luxembourg), est réputée posséder des vertus bénéfiques pour les yeux. De même, jadis, dans la commune bruxelloise dAnderlecht, à lemplacement où la légende chrétienne situe le lieu de la mort de saint Guidon, patron de la localité, sélevait une petite chapelle où fut captée une eau réputée souveraine pour les maladies des yeux. Saint Guidon qui, toujours selon la légende, guérit plusieurs aveugles, était donc également un saint guérisseur. Il était, en outre, un protecteur du bétail. Or, la fête celtique de Beltaine (fête du 1er mai dédiée à Bel ou Bélénos), nom quil convient de mettre en relation avec celui de Bélénos, inclut un aspect de protection du bétail. LApollon hellénique est notamment appelé Lycien en tant que dieu protecteur des troupeaux contre les loups. Ne nomme-t-on pas aussi Bélénos Defensor (=Défenseur) et Sanctus (=Saint) ? Les cultes des saints Guidon et Willibrord ne seraient-ils donc que des christianisations de cultes bien plus anciens ? Laffirmer sans autres preuves ni références serait certainement par trop hardi, mais la question mérite dêtre posée et gageons que plus qualifiés que nous pourrons répondre à cette question avec toute lattention quelle mérite.

 

4. Sur les traces de Bélénos.

 

En Gaule, et ailleurs sur le continent, Bélénos est connu par 97 citations. Or, César semble avoir cité les dieux gaulois en fonction de la fréquence et de lintensité du culte qui leur était rendu. Bélénos arrive ainsi au second plan, juste après Lugos. Le premier témoignage de Bélénos est une inscription en caractères grecs sur un vase trouvé à Calissane (Bouche-du-Rhône, France). Deux inscriptions ont également été signalées dans les Alpes, lune à Suse, lautre à Bardonnèche, où un temple à Bélénos a été découvert. Au Richardet, au-dessus dOulx, un sanctuaire a livré 21 vases votifs portant des dédicaces à Bélénos. Et dautres inscriptions confirment que Bélénos a eu des adorateurs dans les pays dEurope centrale (Norique, Illyrie), de même quen Italie du nord et dans le sud de la Gaule (Cisalpine et Transalpine). Bélénos était notamment réputé être le dieu du Norique et le patron de la ville dAquilée (Vénétie, Italie). Le nom de Bélénos se retrouve, en outre, dans nombre de noms de lieux : Béligny, Bellenot, Belin (Normandie), Bélène (Jura), Beauregard, Mirebel, Belvoir Enfin, au 4ème siècle, le poète Ausone signale encore une famille de druides attachée au culte de Bélénos.

 

5. Visualisation.

 

La seule représentation connue de Bélénos semble être une gemme trouvée à Nîmes (Gard, France). Elle montre un dieu mitré et barbu, vêtu dun manteau brodé détoiles. Lauthenticité est toutefois douteuse.

 

 

Eric TIMMERMANS.©

Le 16 juillet 2010.

 

 

Sources : Essai de dictionnaire des dieux, héros, mythes et légendes celtes, fascicule 1, Claude Sterckx, 1998 / La légende de la mort, Tomes 1 et 2, Anatole Le Braz, Terre de Brume Editions, 1994 / Les Celtes Dieux oubliés, Marcel Brasseur, Terre de Brume Editions, 1996 / Les Celtes et lexpansion celtique, Henri Hubert (La renaissance du livre, 1932), Albin Michel, 1974 / Les Celtes, fureur et immortalité, G. Nenzioni et F. Giromini, Papermint, 1979 / Les Celtes Histoire et dictionnaire, Venceslas Kruta, Robert Laffont, 2000 / Les fêtes celtiques, Françoise Leroux et Christian Guyonvarch, Editions Ouest-France Université, 1995 / Nouveau dictionnaire de mythologie celtique, Jean Markale, Pygmalion, 1999.

 

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12 juillet 2010 1 12 /07 /juillet /2010 19:00

 

 

 

 

 

 

1. Lycanthrope : étymologie.

 

Le terme lycanthrope dérive des mots grecs lycos (=loup) et anthropos (=homme).

 

2. Lhistoire de Lycaon.

 

Lhistoire de Lycaon, nom de deux personnages de la tradition hellénique, dont lun était roi dArcadie alors que lautre fut tué par Achille (cest le premier qui nous intéresse), apparaît comme lune des premières légendes se rapportant à la lycanthropie.

 

Le roi dArcadie Lycaon et ses cinquante fils étaient réputés pour leur impiété. Pour les confondre, Zeus imagina de leur rendre visite sous laspect dun pauvre paysan. Mais Lycaon était méfiant. Aussi, afin de savoir si cet étranger était ou non un dieu, lui fit-il servir de la chair humaine (les membres dun enfant quil venait dégorger et quil avait fait cuisiner) mélangée à dautres mets.

 

Zeus, indigné quon puisse lui offrir un tel repas, foudroya tous les fils du roi, à lexception dun seul nommé Nyctimos et destiné à succéder à Lycaon sur le trône dArcadie. Quant à Lycaon, il fut contraint derrer dans les campagnes sous la forme dun loup mais tout en gardant son intelligence humaine.

 

3. Lycanthrope : les phases de la métamorphose.

 

Dans limagerie populaire, de même que dans la littérature et le cinéma fantastiques, le Lycanthrope désigne un être humain capable de se métamorphoser en loup. On le nomme généralement « loup-garou », mais nous verrons plus loin que ce nom ne devrait vraisemblablement désigner quun stade de la métamorphose lycanthropique.

 

La métamorphose en loup peut, dit-on, être complète ou incomplète. Ainsi le Lycanthrope peut-il apparaître sous la forme dun loup ou sous une forme hybride, mi-homme, mi-loup, marchant sur ses pattes arrière. En cas de transformation complète en loup, on reconnaît le Lycanthrope au fait que, lorsquon la tué dun coup de fusil, il reprend sa forme humaine.

 

Lhumain infecté par le germe de la lycanthropie conserve une apparence normale. Il ignore généralement tout de la présence en lui dudit germe, mais certaines caractéristiques physiques le distinguent des autres humains, et ce, même de jour. Ses sourcils se rejoignent au-dessus du nez. Ses cinq sens, de même que son instinct ou « sixième sens », sont particulièrement développés. Ses canines sont également plus développées que celles dun être humain normalement constitué. La texture de ses cheveux est épaisse et particulièrement drue au milieu du crâne. Lorsquil apparaît, les animaux prennent la fuite ou font montre dune agressivité inhabituelle.

 

Dans la célèbre histoire de Stevenson, « Létrange cas du Dr Jekyll et de Mister Hyde », la transformation dudit docteur Jekyll en un être ignoble nommé Edward Hyde, nest pas sans rappeler ce premier stade de la lycanthropie : « La main de Henry Jekyll (comme vous lavez remarqué) était professionnelle comme forme et comme grandeur ; elle était large, ferme, blanche et gracieuse. Mais la main que javais devant moi, étendue à moitié fermée sur les draps du lit, et que je voyais distinctement dans la lumière jaune dun matin de Londres, était maigre, cordée, noueuse, dune pâleur terne, et ombragée par une épaisse couche de poils noirs. Cette main était la main dEdward Hyde. » (Létrange cas du docteur Jekyll et de mister Hyde, Maxi Poche Jeunesse, 2004, p.135). Ne dit-on pas aussi quon reconnaît un homme frappé de lycanthropie au fait quil a les doigts un peu plats et parfois quelques poils dans la main ?

 

Le second stade de la transformation lycanthropique est celui de lhomme-loup. Dans ce cas, la métamorphose physique est plus prononcée. La taille de lindividu peut augmenter de 10 % et son poids de 25 %. Sa musculature devient plus massive. Les mains sont anormalement longues, des griffes apparaissent au bout des doigts, le corps se couvre de poils, en cela compris le visage, ses oreilles deviennent pointues. Si ces autres sens se développent encore, sa capacité de parole, par contre, se limite à présent à quelques phrases simples. Dans les ténèbres, il peut encore passer relativement inaperçu et il possède encore une lucidité suffisante pour se maîtriser, ce qui lui permet notamment de choisir ses victimes avec plus de soin quaux stades ultérieurs.

 

Une fois encore, cette description de la transformation lycanthropique nous renvoie à un passage de lhistoire de Stevenson. A lorigine, Edward Hyde est de petite stature mais il commence progressivement à se fortifier, à mesure quil prend lascendant sur Jekyll : « Cette partie de moi-même, que javais le pouvoir de faire ressortir, avait été dernièrement bien exercée et fortifiée, et javais remarqué dans les derniers temps que le corps dEdward Hyde avait gagné en stature, et, quand jétais sous cette forme, je sentais un sang plus généreux couler dans mes veines ; je pressentis un grand danger, je fus convaincu que si je prolongeais longtemps ce genre de vie, la balance de ma nature pourrait être renversée à jamais, le pouvoir de la transformation perdu et le caractère dEdward Hyde devenir le mien irrévocablement. » (Ibid., p.137)

 

Le troisième stade de la métamorphose est celui du loup-garou proprement dit, celui qui est le plus connu de limagerie populaire, à tel point que les notions de loup-garou et de Lycanthrope sont généralement considérées comme des synonymes. A ce stade, le poids du sujet augmente de 100 % et sa taille de 26 %. Ses mains et ses pieds, déjà allongés durant le stade précédent, sallongent encore de 50 %. Le corps est à présent totalement couvert de poils, les griffes qui apparaissent aux extrémités des mains et des pieds se font coupantes, les dents sont des crocs, une queue de loup apparaît, les oreilles sallongent et sont plus pointues encore quau second stade de la métamorphose, sa mâchoire sallonge à tel point quelle transforme le sujet en cynocéphale, cest-à-dire un être à tête de canidé. Le corps est désormais surmonté dune énorme tête de loup. Sa capacité de parole est à présent pratiquement nulle et se limite à quelques mots basiques. Quant à la manipulation de certains objets, elle lui est devenue impossible. Il est meurtrier, rapide, précis et se déplace soit à quatre pattes, soit sur ses seuls membres antérieurs.

 

Le quatrième stade de la métamorphose est celui du presque-loup. Il précède la métamorphose complète du sujet en loup. A ce stade, ledit sujet naugmente ni de taille ni de poids, mais il nest plus capable de se déplacer sur ses deux seuls membres antérieurs et ne se meut donc plus quà quatre pattes. Son aspect est celui dun loup anormalement grand, ce qui nest pas sans rappeler certaines descriptions de la célèbre Bête du Gévaudan. Ses capacités et ses sens se trouvent encore améliorés. Le sujet nest toutefois plus capable de manipuler aucun objet, aussi simple soit-il, mais il lui est toujours impossible de se faire accepter en tant que loup normal dans une meute.

 

Enfin, survient le cinquième stade, celui du loup proprement dit. Le poids du sujet diminue de 125 % et sa taille de 25 %. Le voilà à présent visible sous laspect dun loup commun, celui que lon connaît sous le nom scientifique de Canis lupus. Le Lycanthrope ainsi métamorphosé nen est pas moins supérieur aux loups communs, mais sil est capable à présent de rejoindre une meute, il ne pourra jamais saccoupler avec une louve commune. A noter aussi que les Lycanthropes sont réputés parfois chasser en meute à linstar des loups.

 

4. Comment devient-on un Lycanthrope ?

 

On peut devenir un Lycanthrope de manière involontaire ou de manière volontaire.

 

Dans le premier cas, le sujet est mordu par un Lycanthrope et les germes du mal lui sont transmis par la salive de la bête.

 

Dans le second cas, la métamorphose en Lycanthrope résulte de la pratique de la sorcellerie, dun pacte diabolique ou, de manière plus réaliste et prosaïque, de lusage de certaines drogues, telle que la belladone qui pourrait, par son ingestion, donner lillusion de la transformation lupine (ce qui rejoint également lidée de la « décorporation », soit la sortie du corps matériel vivant dun « double immatériel » ou « fantôme »).

 

Toujours dans lhistoire du Dr. Jekyll et de Mister Hyde, on retrouve cette référence au breuvage déclenchant la métamorphose : « Cest assez dire que non seulement javais reconnu que mon corps matériel nétait que le mirage ou lombre de certains éléments dont mon âme était constituée, mais que jétais même arrivé à composer un breuvage qui avait le pouvoir de détrôner ces éléments, de marracher à leur domination, et de me donner une seconde forme, une nouvelle physionomie, lesquelles ne métaient pas moins naturelles, quoiquelles fussent lexpression et portassent la marque des éléments les plus dégradants de mon âme. » (Létrange cas du Docteur Jekyll et de Mister Hyde, Maxi-Poche Jeunesse, 2004, p.125-126)

 

Mais il existe encore un autre cas de lycanthropie : celle qui découle dune malédiction frappant des criminels voués au Diable, cest-à-dire que leur caractère de Lycanthrope constitue le prix à payer pour leur pacte diabolique. « En Normandie, à la fin du XVIIIe siècle, on publiait des « monitoires » appelant une personne soupçonnée de crime à se livrer. Si, à la troisième publication, lindividu ne se montrait toujours pas, il était débaptisé par lEglise et abandonné au diable. On croyait quil se mettait alors à courir le garou toutes les nuits, couvert dune peau de loup, obligé de sarrêter à chaque carrefour et devant chaque croix pour y être fouetté par le Malin. () Lorsque cette transformation animale est le fait dune punition, celle-ci est censée durer sept ans. Mais si le monstre est blessé et que son sang coule, il se trouve délivré de son calvaire.» (Superstitions et croyances des pays de France, Marie-Charlotte Delmas, p.112)

 

Voici ce que dit aussi de la lycanthropie Eliphas Lévi, alias labbé Constant : « Je veux parler de la lycanthropie ou de la transformation nocturne des hommes en loups, si célèbres dans les veillées de nos campagnes, par les histoires de loups-garous ; histoires si bien avérées que, pour les expliquer, la science incrédule a recours à des manies furieuses et à des travestissements en animaux. Mais de pareilles hypothèses sont puériles et nexpliquent rien. Cherchons ailleurs le secret des phénomènes observés à ce sujet et constatons dabord :

1° Que jamais personne na été tué par un loup-garou, si ce nest par suffocation, sans effusion de sang et sans blessures ;

2° Que les loups-garous sont traqués, poursuivis, blessés même, nont jamais été tués sur place.

3° Que les personnes suspectes de ces transformations ont été toujours retrouvées chez elles, après la chasse au loup-garou, plus ou moins blessées, quelquefois mourantes, mais toujours dans leur forme naturelle. » (Dogme et rituel de la haute magie, Eliphas Lévi, Editions Bussières, 1988, p.137)

 

« Osons dire maintenant quun loup-garou nest autre chose que le corps sidéral dun homme, dont le loup représente les instincts sauvages et sanguinaires, et qui, pendant que son fantôme se promène ainsi dans les campagnes, dort péniblement dans son lit et rêve quil est un véritable loup. Ce qui rend le loup-garou visible, cest la surexcitation presque somnambulique causée par la frayeur chez ceux qui le voient, ou la disposition, plus particulière aux personnes simples de la campagne, de se mettre en communication directe avec la lumière astrale, qui est le milieu commun des visions et des songes. Les coups portés au loup-garou blessent réellement la personne endormie par congestion odique et sympathique de la lumière astrale, par correspondance du corps immatériel avec le corps matériel. » (Dogme et rituel de la haute magie, Eliphas Lévi, Editions Bussières, 1988, p.138)

 

Certaines sources prétendent aussi que la Lycanthropie se transmet de père en fils, surtout si le fils est issu dun couple illégitime.

 

5. A savoir également à propos des Lycanthropes.

 

5.1. Cest de nuit que le Lycanthrope est condamné à errer sous sa forme monstrueuse.

 

5.2. Selon certaines traditions, il est dit que la métamorphose peut se produire à nimporte quel moment de lannée, mais selon dautres sources, il est dit quelle ne se produit quen période de pleine lune, et ce durant un cycle de trois jours (ou de douze jours).

 

5.3. On précise parfois que les Lycanthropes se tiennent généralement près des fontaines, car cest en sy baignant quils opèrent leur métamorphose. Il sy replonge ensuite pour reprendre une forme humaine.

 

5.4. A la suite dEliphas Lévi, il est dit que la partie du corps du Lycanthrope qui a été sectionnée, redevient humaine après quelques heures et quun Lycanthrope redevient presque immédiatement humain lorsquil a été tué.

 

5.5. Toute blessure faite au Lycanthrope est faite également à la personne humaine qui le suscite.

 

5.6. Pour Institoris et Sprenger, les auteurs du célèbre Malleus maleficarum ou « Marteau des sorcières », le Lycanthrope ne serait rien dautre quun loup démoniaque, soit un loup possédé par un démon qui le rend féroce, audacieux et invulnérable.

 

5.7. La croyance en la lycanthropie fut longtemps tenace. Rien quen France, 30.000 cas de lycanthropie « réelle » ou supposée, furent recensés entre 1520 et 1630. On prétendait que chaque village possédait son loup-garou, ce qui donne une idée des vexations et des persécutions dont eurent à souffrir tous les « hors-normes » de jadis, assimilés à des sorciers ou à des « hommes-loups » que lon sempressait, le cas échéant, de remettre au bras séculier.

 

5.8. Il existe de nombreuses théories concernant la manière de tuer un Lycanthrope : utilisation de balles en argent, bénites ou sur lesquelles on a gravé une croix, décapitation, etc. Toutefois, le Lycanthrope est réputé difficile à tuer, voire carrément invulnérable.

 

5.9. Il est dit que la peau des Lycanthropes est dun cuir si dur quil résiste aux balles de fusil, à moins quelles naient été bénites à minuit, dans une chapelle dédiée à saint Hubert, patron des chasseurs.

 

5.10. Il est dit que les Lycanthropes entrent dans les demeures par la fenêtre, lieu de passage préféré de la Mort

 

5.11. On dit que celui qui a les doigts gros et courts, et qui les cache généralement dans les paumes de sa main, est un Lycanthrope.

 

5.12. Celui qui a les doigts plats nest guère mieux considéré puisquen Normandie on voit également en lui un sorcier ou un Lycanthrope.

 

5.13. Pour rendre à un Lycanthrope sa forme humaine, il faut lui donner un coup de fourche entre les deux yeux.

 

5.14. Les Lycanthropes se nourrissent de chair fraîche, avec une claire préférence pour celle des chiens et des enfants. Un « gourmet-gourmand », en quelque sorte !

 

5.15. Si la légende du Lycanthrope trouve plutôt ses racines en Europe occidentale, celle du Vampire est plus certainement originaire dEurope orientale. Il existe entre ces deux créatures infernales un certain nombre de différences, mais également des points communs. Ainsi, à la suite de Stanislas de Guaïta, peut-on remarquer que si le Vampire apparaît comme le double de personnes défuntes, les Lycanthropes, eux, sont clairement des doubles de personnes bien vivantes (plus précisément, sorciers ou sorcières).

 

5.16. La bestialité est un modèle idéal de procréation pour les Lycanthropes : ne dit-on pas que les Lycanthropes mâles éprouvent plus de plaisir avec les louves avec les femmes ? Des monstres hybrides naissent, dit-on, de ces unions sataniques. On les reconnaît à leur extrême pilosité et à leur dégénérescence physique.

 

6. La Lycanthropie, une maladie psychique ?

 

Dun point de vue psychologique, la lycanthropie est également nommée « folie louvière » ou encore « lypémanie ». Il sagit dune maladie psychique, dun déséquilibre mental, qui fait quune personne croit réellement sêtre transformée en loup. Le sujet se désigne lui-même comme un loup et prend les attitudes de cet animal. On le considère comme dangereux, tant pour lui-même que pour son entourage, cela va sans dire

 

Les cas de lypémanie seraient notamment le fait de personnes victimes dhallucinations provoquées notamment par la faim et qui les amènent à se prendre pour des loups. Il sagirait dune forme dauto-persuasion, à savoir que le sujet est tellement obsédé par lidée de sa métamorphose, quil finit par la vivre.

 

Comme explication à la lycanthropie, les spécialistes évoquent notamment la schizophrénie, un syndrome cérébral organique accompagné de psychose, une réaction dépressive psychotique, une névrose hystérique de type dissociatif, une psychose maniaco-dépressive ou encore lépilepsie psychomotrice.

 

Cest le célèbre démonologue Jean Wier, disciple de Corneille Agrippa, qui le premier osa affirmer, au risque dencourir les foudres de lEglise, que la lycanthropie était une maladie et non le résultat dune entreprise démoniaque, ce qui contredit notamment Eliphas Lévi qui voit dans le lycanthrope une personne en syncope dont le « fantôme » ou, plus précisément, le Double irait de nuit par monts et par vaux, sous lapparence dun loup ou dun sorcier se rendant au Sabbat

 

7. Une histoire de Lycanthrope.

 

En Auvergne, au 16e siècle, un chasseur sétant battu avec un loup, était parvenu à lui couper une patte antérieure à laide de son couteau de chasse. Lorsquil voulut sortir le trophée de sa poche, il en extirpa, à sa grande stupeur, une main de femme portant lalliance qui nétait autre que celle de sa propre épouse. De fait, il découvrit sa femme qui se chauffait près dun feu, sa main gauche sous le tablier. On découvrit bientôt que sa main avait été coupée et elle avoua être un Lycanthrope. La malheureuse fut finalement brûlée. On est toutefois en droit de soupçonner le mari davoir mis sur pied toute cette machination dans le seul but de se débarrasser de son épouse, sans avoir à lui rendre sa dot

 

Eric TIMMERMANS

Bruxelles, le 12 juillet 2010.

 

 

 

 

 

 

Sources : Dictionnaire des superstitions, R. Morel et S. Walter, Marabout, 1972 / Dictionnaire des superstitions et des croyances populaires, Pierre Canavaggio, Jean Claude Simoën, 1977 / Dictionnaire du Diable, Roland Villeneuve, Omnibus, 1998 / Dictionnaire du diable, des démons et sorciers, Pierre Ripert, Maxi-Poche Références, 2003 / Le Prince de ce monde, Nahema-Nepthys et Anubis, Editions Savoir pour Être, 1993 / Superstitions et croyances des pays de France, Marie-Charlotte Delmas, Editions du chêne, 2003.

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8 juillet 2010 4 08 /07 /juillet /2010 15:38

 

 

 

 

1. Vritra dans la Tradition védique.

 

Le nom de Vritra (ou Vrtra) signifie « résistance ».

 

Il est dit qu’en annihilant le dragon (ou serpent) Vritra, Indra donna forme au chaos et qu’il déclencha le processus de différenciation des phénomènes et leur évolution. Ainsi, à la mort du serpent, la terre se vit séparée des eaux, les régions supérieures se distinguèrent des enfers, et, chaque matin, désormais, la création se renouvela avec le lever du soleil.

 

Par ce mythe, Indra acquit une réputation de divinité luttant contre lobstruction et les ténèbres. Il est même dit que Vishnu soutînt Indra dans sa lutte contre Vritra et quil laida à déployer les espaces intermédiaires entre Ciel et Terre.

 

Toutefois, lorsque la popularité dIndra se fit moindre dans lhindouisme plus tardif, on affirma que Vritra était en fait un brahman et quIndra, en le tuant, avait commis un crime impardonnable, dautant que l’on prétendit quil avait frappé Vritra en traître.

 

2. Vritra dans le Veda.

 

Rig Veda, 1.32 :

 

« Je vais dire à présent les prouesses dIndra,

celles qua faites les premières le Dieu porte-foudre :

il tua le dragon, perça les eaux,

rompit les flancs des montagnes.

 

« Il tua le dragon qui saccrochait à la montagne.

Tvastar avait façonné pour lui le foudre sonore.

Comme des vaches mugissantes, courant

droit vers la mer les Eaux ont dévalé.

 

« Faisant acte de mâle il avait aimé le soma,

dans la fête aux Trois Cuves il avait bu le liquide pressuré.

Le libéral a pris larme de jet, le foudre :

il a tué le premier-né des dragons.

 

« O Indra, quand tu eus tué le premier-né des dragons,

déjoué les artifices des maîtres dartifices,

créant alors le soleil, le ciel, laurore,

tu nas désormais plus rencontré de rival.

 

« Cest par la foudre, la grande arme,

quIndra a tué Vrtra aux larges épaules, puissant obstacle.

Comme les troncs abattus par la cognée,

le dragon gît plaqué contre la terre.

 

« Tel un lâche guerrier pris divresse mauvaise il avait provoqué

le grand héros, chasseur valeureux, buveur des marcs du soma.

Il na pas soutenu le choc de ses armes : le char brisé,

sest effondré celui dont Indra fut lennemi

 

« Sans pieds, sans mains il luttait contre Indra,

qui asséna le foudre sur son dos.

Eunuque qui se croyait à légal du mâle,

Vrtra gît en maint endroit déchiqueté.

 

« Gisant de malemort, comme un tuyau crevé

les eaux passent par-dessus lui promouvant leur courage.

Elles que Vrtra encerclait de sa grande taille,

cest à leurs pieds que gît désormais le dragon.

 

« La mère de Vritra eut sa vigueur défaite :

Indra avait porté sur elle larme de la mort.

Au-dessus la génitrice, au-dessous était le fils.

La démone est étendue comme la vache auprès du veau.

 

« Parmi les courants qui ne demeurent et ne font trêve

son corps est déposé. Les Eaux circulent

sur la cachette de Vrtra : pour de longues ténèbres

sest couché celui dont Indra fut lennemi.

 

« Epouses du démon, le dragon est leur gardien,

les Eaux sont prisonnières comme les vaches sous les Pani.

 

« En tuant Vrtra il a ouvert les bondes des Eaux,

qui étaient fermées.

 

« Tu devins un crin de cheval, ô Indra,

Dieu unique, lorsquen riposte il teut frappé à la mâchoire.

 

« Tu as conquis les vaches, conquis le soma,

ô héros, libéré les fleuves en sorte quils coulent.

 

« Nont servi de rien léclair ni le tonnerre,

ni la nuée et la grêle que le démon avait semées.

Lorsque Indra et le dragon ont combattu,

cest le Libéral qui demeure vainqueur pour les temps à venir.

 

« Quel vengeur du Dragon test apparu, ô Indra,

pour quen ton âme, toi qui lavais tué, lépouvante pénétrât,

et quau-dessus des nonante et neuf rivières,

tu traversasses lespace comme un aigle apeuré ?

 

« Ce qui marche et ce qui se repose, ce qui est sans cornes

et ce qui est cornu, Indra en est le roi il tient le foudre

dans ses bras : en roi il commande aux peuples,

il enveloppe ce monde comme la jante enveloppe les rais. »

 

Il est dit, en outre, dans les « Spéculations », quon prépara un flan sur onze tessons et quon loffrit en oblation à Agni et à Soma, selon la norme des oblations végétales. Et cest, dit-on, grâce à cette oblation, quIndra pu tuer Vritra. On dit aussi qu’près avoir tué Vritra, Indra fut saisi de peur. Mais on prépara un flan sur douze tessons et on loffrit en oblation à Indra et à Agni, toujours selon la norme des oblations végétales. Cest grâce à cette oblation quIndra put retrouver sa force et sa vigueur.

 

 

Eric TIMMERMANS.

Bruxelles, le 8 juillet 2010.

 

 

Sources : Les Cinq Livres de la Sagesse Pancatantra, Alain Porte, Editions Philippe Picquier / Le Veda, textes réunis, traduits et présentés sous la direction de Jean Varenne, Les Deux Océans, 2002 / Le Védisme. Léveil de la spiritualité indienne. Bernard Baudouin. Editions de Vecchi, 1997.

 

 

 

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6 juillet 2010 2 06 /07 /juillet /2010 19:20

 

 

 

 

1. Ah Puch dans la Tradition maya.

 

Ah Puch est le dieu de la Mort dans le panthéon maya. Il est lune des plus importantes divinités infernales de cette tradition. Il est également désigné par les mentions « dieu A » et « A », correspondant à deux formes principales du dieu de la Mort maya.

 

« Alors quil semble quau classique la mort nétait quune figure allégorique, dans les derniers siècles avant la Conquête, elle accède au panthéon maya sous deux formes principales : A et A, avec leurs expressions glyphiques respectives. A est un squelette orné de taches cadavériques et d « yeux arrachés ». A porte des os croisés et des yeux sur son vêtement ainsi que le signe cimi sur la joue ; akbal marque son front, une tache noire entoure son œil, un os et des yeux arrachés se trouvent dans sa coiffure. Le glyphe principal désignant cette créature reproduit le visage du dieu, ou une tête privée de mâchoire. » (Baudez).

 

Dans les textes coloniaux ce dieu est connu sous le nom dAh Puch (=le Décharné), ou encore sous le nom de Hun Ahau (=le Seigneur). On le connaît encore sous les noms de Cizin (=le Flatulent) chez les Mayas postclassiques et modernes, de même que sous celui de Yum Cimih (=Seigneur de la Mort). Les Mayas du Yucatan lui donnent également le nom de Kisin (=le Puant). De fait, contrairement au dieu du vent qui véhicule une odeur parfumée, Ah Puch propage la putréfaction et les odeurs fétides qui en proviennent.

 

Ah Puch, dieu associé à la Maladie et à la Mort, qui vit au plus profond des Enfers, là où vont les âmes des morts, est particulièrement craint car il règne sur les périodes de sécheresse et de disette. Cest pour cette raison aussi quil apparaît comme lennemi naturel de Chac, le dieu de la Pluie, un dieu présidant à la fertilité. Dans le Popol Vuh des Mayas Quichés, on donne au dieu de la Maladie et de la Mort les noms de Hun Came (=Un Mort) et de Vucub Came (=Sept Morts).

 

Les Mayas considèrent Ah Puch comme un être dégoûtant et de peu dintelligence qui peut être trompé assez facilement.

 

2. Iconographie et visualisation.

 

2.1. On retrouve des représentations dAh Puch dans le Tzompantli ou Temple des Crânes de Chichen Itza (Yucatan, Mexique).

 

2.2. Dans les codex et dans lart, Ah Puch est représenté sous la forme dun crâne ou dun corps en décomposition.

 

2.3. Dans les codex, on représente également Ah Puch avec des petites cloches ou des yeux sur la tête, les poignets et les chevilles.

 

2.4. On montre Ah Puch sous la forme dun être petit et grotesque, exécutant parfois une danse du ventre sauvage et endiablée !

 

2.5. On représente aussi Ah Puch fumant et en pleine extase, ou dans lart, effectuant lautosacrifice du pénis, ou encore présidant aux rites de nouvelle année qui inclut le sacrifice (kex). Certaines scènes de lart maya suggère que des enfants ont ainsi été sacrifiés au cours des rites du Kex.

 

2.6. Ah Puch est représenté dans le codex de Madrid.

 

2.7. Une statue d’Ah Puch est visible au musée du Quai Branly, à Paris.

 

3. A savoir également.

 

3.1. Les Mayas contemporains ont gardé la coutume doffrir des poulets en sacrifice aux dieux de la Maladie et de la Mort, afin dobtenir leur guérison.

 

3.2. Le jour du calendrier maya nommé Kimi est notamment représenté par un crâne et un couteau de sacrifice.

 

3.3. Ah Puch est lié aux quatre points cardinaux, aux dieux de la Guerre, des Sacrifices et des Accouchements, au calendrier, au chien, au hibou, à l « Oiseau de Gémissement ».

 

 

Eric TIMMERMANS

Bruxelles, le 6 juillet 2010.

 

 

Sources : Mythes aztèques et mayas, Karl Taube, Seuil, 1995 / The mayan gods, Dante – The Maya World Publisher’s – Musée de Mérida, Mexique / Une histoire de la religion des Mayas, Claude-François Baudez, Bibliothèque Albin Michel Histoire, 2002.

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1 juillet 2010 4 01 /07 /juillet /2010 17:55

 

 

 

 

 

 

1. La naissance dAphrodite.

 

Il existe deux versions de la naissance dAphrodite. Selon Homère, cette déesse serait la fille de Zeus et de Dioné, mais selon une autre version, Aphrodite serait née de la semence dOuranos, émasculé par Cronos. Cette semence tomba dans la mer et la déesse apparut au creux dune vague, aussi blanche et aussi belle que lécume. Le nom dAphrodite dérive dailleurs du terme aphros qui signifie l « écume de la mer » ou « née de lécume ». Une œuvre dApelle, peintre dAlexandre le Grand, représente Aphrodite surgissant des flots marins. Elle fut destinée au sanctuaire dAscalaphos, dans lîle de Cos. Cette peinture, qui a fait la célébrité de ce sanctuaire, a hélas disparu. Il semble que lhistoire de la naissance dAphrodite résulte de la fusion de deux légendes dorigine hittite.

 

2. Une déesse « marine » de la Vie universelle.

 

Lorigine marine dAphrodite en a naturellement fait une déesse protectrice des marins. Son culte était donc particulièrement répandu dans les villes portuaires et dans les îles. Ainsi en était-il de Chypre qui en était le centre principal et le plus ancien. Traditionnellement, cest d’ailleurs au large de lîle de Chypre que la déesse serait sortie des flots marins. En effet, à peine avait-elle surgi de la mer, dans un grand coquillage nacré, que la déesse fut poussée vers Cythère, puis vers les rives de lîle de Chypre, par le vent Zéphyre. De là vient son nom dAphrodite Cypris ou encore dAphrodite Cythérée. Par la suite, Zéphyre confia Aphrodite aux Heures qui, bienveillantes, se chargèrent de son éducation. Elles lui firent également cadeau dune ceinture qui la rendit irrésistible. Aphrodite est généralement assimilée à une déesse de la Beauté et de lAmour. Soulignons toutefois quelle est aussi, et même avant tout, une déesse de la Fécondité. Ainsi préside-t-elle au mariage, aux naissances, à la fécondité du foyer. Elle favorise également la fertilité des champs.

 

3. Les attributs d’Aphrodite.

 

Cette déesse compte parmi ses attributs un certain nombre de végétaux et danimaux. Parmi les premiers on remarquera, tout particulièrement, les fruits aux nombreux pépins, symboles de la force fécondantes : pomme, grenade, pavot Le myrte et la rose lui sont également consacrés. Parmi ses animaux-attributs, on compte des oiseaux comme la colombe, le pigeon, le cygne, ou loie (sur un plat attribué à Pistoxénos et datant denviron 460 avant lère chrétienne, Aphrodite chevauche une oie prenant son envol). On trouve également le bélier, le bouc ou le lièvre, en raison de leur prolixité.

 

4. La Pomme de discorde.

En tant que déesse de la Beauté et de lAmour, Aphrodite sest tout particulièrement illustrée dans la célèbre histoire de la « pomme de discorde ». Eris, que lon nomme la « Mère de tous les maux », nayant pas été invitée aux noces de Pélée et de Thétis, simposa à lassistance et lança au milieu delle une pomme dor sur laquelle étaient écrits ces quelques mots : « A la plus belle ». Ce geste avait pour but de semer la discorde entre les déesses Aphrodite, Athéna et Héra. Sur ordre de Zeus, Hermès plaça les trois déesses en présence de Pâris, fils de Priam, roi de Troie, qui dut juger de leur beauté. Cest sur le mont Ida de Troade que ce déroula le jugement et cest finalement à Aphrodite que Pâris remit la « pomme de discorde » dEris. La beauté supérieure dAphrodite se voyait ainsi reconnue, ce qui provoqua la verte jalousie des deux autres déesses qui, désormais, poursuivirent Pâris dune indéracinable haine et prirent, pour cette raison, le parti des Grecs contre Troie. Aphrodite, quant à elle, prit le parti des Troyens et fit naître entre Hélène et Pâris, un amour dune intensité sans égale, la déesse ayant promis à Pâris que sil la choisissait, elle lui donnerait la plus belle femme du monde. Athéna lui promit de le rendre invisible au combat et Héra voulut lui donner lAsie pour empire, mais Parîs préféra la belle Hélène, ce « cadeau empoisonné » qui signa la perte de Troie.

 

5. Aphrodite, une déesse redoutable.

 

Déesse de lAmour, de la Beauté, de la Fécondité, de la Fertilité (de son nom dérive le terme « aphrodisiaque »), Aphrodite nen nest pas moins, comme nous venons de le voir, une déesse redoutable. Ainsi, elle favorise les passions les plus intenses, encourage ladultère et incite les mortels à la luxure. Aphrodite apparaît, dans ce cas, sous laspect dune « déesse fatale ». Sa ceinture magique, en outre, donne à celui ou celle qui la porte, létrange pouvoir dêtre perpétuellement désirable.

 

Examinons quelques actes de cette déesse qui peut, lorsquelle le veut, se révéler terrible :

 

-Aphrodite poussa Myrrha, qui avait négligé son culte, à ressentir pour son père un amour incestueux.

 

-La déesse suscita dans le cœur de Phèdre un intense amour pour Hyppolyte, protégé dArtémis, et tous deux trouvèrent la mort.

 

-Aphrodite poussa Léda, épouse de Tyndare, le roi de Sparte, à commettre ladultère avec Zeus, puis condamna la descendance qui naquit de cette union à des amours tumultueux, tout cela parce que Tyndare avait omis de réserver la part dAphrodite lors dun sacrifice.

 

-Aphrodite conçut également un amour violent pour Adonis. Cette histoire est la reproduction dun mythe phénicien relatant lamour dAstarté pour Adonis.

 

6. Aphrodite, une origine orientale ?

 

Si lon sait généralement quAphrodite a été assimilée, assez tardivement (2ème siècle de lère chrétienne), à la déesse romaine Vénus, notons toutefois que son caractère redoutable évoque également la déesse orientale Astarté, dont la plupart des rites se retrouvent dans le culte dAphrodite. Lorigine du culte dAphrodite serait donc, vraisemblablement, au moins en partie, dorigine orientale. En Egypte, Aphrodite est assimilée à Hathor et la déesse fut vénérée à Aphroditopolis, une ville située près de Memphis où lon vénérait, dans un temple, une vache blanche traditionnellement consacrée à la déesse Hathor. La vache blanche renvoie aussi, notamment, à la déesse irlandaise Brighid. A noter toutefois que la tradition égyptienne à laquelle appartient Hathor ne sinscrit pas, contrairement à Brighid (et à Aphrodite), dans le contexte indo-européen. Nous faisons donc cette comparaison à titre purement indicatif.

 

7. La déesse aux nombreux amants.

 

7.1. Epouse dHéphaïstos, quelle trompa souvent, Aphrodite entretint une relation passionnée avec le dieu de la Guerre, Arès. Elle lui donna plusieurs enfants, parmi lesquels Eros (dont on fait abusivement un pendant du Cupidon latin) et Antéros. Des amours dAphrodite naquirent aussi Harmonie, Deimos (=la Terreur) et Phobos (=la Crainte). Toutefois, les deux amants furent un jour surpris par Héphaïstos qui les fit prisonnier dans un filet de sa conception. Mal lui en prit, car les dieux rirent au moins autant de la déconvenue des deux amants prisonniers que du mari trompé ! Honteuse de cette déconvenue, Aphrodite quitta lOlympe pour un tempset devait à nouveau tromper Héphaïstos avec, notamment, Dionysos, Hermès et Poséidon.

 

7.2. Dans le cas dHermès elle ne fut cependant pas consentante. Aphrodite sétant refusée à lui, Hermès lui vola une de ses sandales et naccepta de la lui rendre que lorsque la déesse céda et se décida à lui offrir ses charmes. De cette union naquit un être hybride : Hermaphrodite.

 

7.3. Des amours dAphrodite et de Dionysos, naquit Priape.

 

7.4. La déesse aima également nombre de mortels. Ainsi, Anchise à qui elle donna Enée, ancêtre des Julii dont Jules César prétendait descendre. La ville de Rome était dailleurs placée sous la protection de Vénus-Aphrodite. Dautres mortels furent aimés de la déesse : Cinyras, le roi de Chypre ; Pygmalion, qui fabriqua une statue en ivoire de la déesse, tant il en était amoureux ; Phaéton (=le Brillant) ou encore Boutès (=Berger), lArgonaute.

 

7.5. Mais le grand amour dAphrodite fut, sans conteste, Adonis, qui suite à un jugement de Zeus se vit dans lobligation de vivre un tiers de lannée avec Aphrodite, un autre tiers avec Perséphone, restant libre daller où bon lui semble, le troisième tiers. Cela correspond au cycle de la végétation dont Adonis est un symbole. Cest également la reproduction dun mythe phénicien évoquant lamour dAstarté pour Adonis.

 

  1. Les temples dAphrodite.


 

Outre son sanctuaire de Chypre (Idalie), Aphrodite fut adorée dans bien dautres temples : Cythère (sur le mont Eryx, dans louest de la Sicile), Paphos, Cos, Cnide, Athènes, Thèbes, Mégare, Patras, Argos, Scyon, Corinthe (appelée « Ephyra » par Homère). Ce dernier fut lun des principaux centres de culte dAphrodite et doit sa célébrité du fait de son emplacement sur un isthme.




 

9. Les multiples noms dAphrodite.

 

-Anadyomène (=Sortie des flots).

 

-Androphanos est la « Tueuse dhommes ».

 

-Callipyge (=Celle aux belles fesses).

 

-Cythérée, du temple de Cithère.

 

-Epithymbia est « Celle des tombes ».

 

-Erycine, du temple dEryx, en Sicile.

 

-Genetrix, déesse de la génération.

 

-Hétaïra (ou Porné) est la protectrice des courtisanes.

 

-Kypris, du temple de Chypre.

 

-Mélaenis est dite la « Noire ».

 

-Nikêphoros (=Qui donne la victoire). La déesse est alors figurée nue jusquà la ceinture et se regarde dans un miroir.

 

-Nymphia (=Déesse du mariage).

 

-Pandemos est lincarnation de lAmour vulgaire.

 

-Pélagia (ou Pontia), déesse de la navigation.

 

-Pontia (ou Pélagia), déesse de la navigation.

 

-Porné (ou Hétaïra) est la protectrice des courtisanes.

 

-Scotia est dite la « Sombre ».

 

-Urania (=Amour idéal). Aphrodite fut adorée sous ce nom à Argos, Athènes et Scyon. Elle apparaît là sous les traits dune déesse digne et grave.

 

10. Visualisation.

 

Aphrodite est généralement représentée nue ou à demi vêtue dun mince voile qui moule les formes de son corps. Toutefois, dans lart archaïque et sur les poteries, Aphrodite est plus généralement représentée vêtue. Ce nest quultérieurement, au cours de la période classique, quelle apparaît totalement ou partiellement nue. Sur une amphore ionique datant du 6e siècle avant lère chrétienne, conservée à Munich, Aphrodite apparaît même somptueusement vêtue dans le contexte du « jugement de Pâris ». Plusieurs œuvres de Phidias la montrent également vêtue. A noter encore, quun sujet courant dans lart hellénique est lAphrodite au bain, telle la statue de Dédalsas, datant du 3e siècle avant lère chrétienne, conservée au Louvre. Comme toutes les grandes déesses, Aphrodite peut être accompagnée dun cortège de Nymphes, Heures, Tritons, Néréides

 

 

Eric TIMMERMANS

Bruxelles, le 2 juillet 2010.

 

Sources : Dictionnaire de la mythologie grecque et latine, Odile Gandon, Livre de Poche Jeunesse, 2000 / Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Joël Schmidt, Larousse, 1965 / Encyclopédie de la mythologie, Sequoia, 1962 / Grand dictionnaire des symboles et des mythes, Nadia Julien, Marabout, 1998.

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1 juillet 2010 4 01 /07 /juillet /2010 17:05

 

 

 

 

 

1. Hadès, dieu des Enfers.

 

Le nom d’Hadès (ou Ades, Aides, Haides), signifie « invisible ». De fait, parmi les attributs de ce dieu, on trouve un casque qui a la capacité de le rendre invisible. Ce casque a été confectionné par les Cyclopes qui lui en ont fait don. Par ailleurs, Hadès le prête parfois à certains héros auxquels il a décidé d’accorder aide et protection. Dieu grec des Enfers ou, plus précisément, de la Mort, Hadès était très redouté des Grecs, car il a la réputation d’être un justicier impitoyable. Précisons toutefois que ce dieu n’est pas un pourvoyeur de mort mais celui qui accueille les âmes des morts. Fils de Cronos et de Rhéa, Hadès obtint, suite au partage de l’univers entre lui-même et ses frères Zeus et Poséidon, qui reçurent respectivement le Ciel et la Mer, le monde inférieur des Enfers au fond duquel il réside, assis sur son trône et tenant dans sa main un sceptre avec lequel il gouverne les âmes des morts. Hadès ne remonte que rarement des Enfers pour se joindre à l’assemblée des dieux olympiens. En outre, aucun temple ne fut construit en son honneur : on ne lui rendait un culte que la nuit, en lui sacrifiant des taureaux et des moutons noirs afin de tenter d’apaiser sa colère. Bien que peu représenté dans l’iconographie, on peut généralement voir Hadès entouré de divinités infernales qui sont ses servantes et ses messagères.

 

2. Hadès Dis Pater.

 

Les Latins, quant à eux, désignaient Hadès sous le nom de Dis Pater ou encore dOrcus. On le confond parfois aussi avec Pluton, « Celui qui dispense les richesses ». La double attribution de dieu de la mort et de la fertilité, donc de la vie, peut paraître paradoxale, mais on la retrouve tant chez Hadès que chez Perséphone –dont on sait qu’elle fut enlevée par le dieu qui en fit son épouse, ce qui ne l’empêchera guère de commettre quelques infidélités, tant avec des nymphes qu’avec des mortelles…-, de même, comme nous venons de le dire, que chez certaines divinités latines, et elle est en fait commune à presque toutes les grandes divinités infernales. En effet, si le royaume des Enfers est souterrain et accueille les morts, les produits agricoles sortant de terre semblent bien provenir du même lieu. Ceci explique que Hadès est invoqué par les agriculteurs et que, sous son aspect de dispensateur de richesses, on le représente placide, tenant dans une main une corne d’abondance et dans l’autre, des instruments aratoires. Le cyprès et le narcisse sont également des attributs dédiés à Hadès.

 

3. Le Royaume de l’Hadès.

 

Le nom dHadès désigne également les Enfers eux-mêmes : le Royaume infernal de lHadès. On dit de ce dernier quil est un endroit lugubre, encerclé par les rivières Achéron, Styx et Léthé. Le Cocyte et le Phlégéton sont également mentionnés. Cest en tout cas de cette manière que lHadès sera décrit par Virgile qui, bien des siècles plus tard, est supposé avoir conduit Dante dans le Royaume infernal de Lucifer, les traits du diable chrétien devant beaucoup aux dieux grecs Pan et Hadès. On sait que lentrée du Royaume de lHadès est gardée par le chien monstrueux Cerbère et que, devant cette entrée, se tiennent aussi les trois juges infernaux, Eaque, Minos et Rhadamante. Les âmes des trépassés doivent comparaître devant leur tribunal afin qu’ils fixent le sort qui leur est échu. Elles sont conduites par Hermès Psychompos jusqu’à la barque du passeur Charon qui leur fait alors traverser le terrible Styx. Mais il est précisé que seul l’ombre de celui qui est enterré ou brûlé peut entrer dans le Royaume des Morts, alors que ceux qui restent sans sépulture sont condamnés à errer, sans jamais pouvoir trouver le repos.

 

 

Eric TIMMERMANS

Bruxelles, le 2 juillet 2010.

 

 

 

Sources : Dictionnaire de la mythologie grecque et latine, Odile Gandon, Livre de Poche, 1996 / Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Joël Schmidt, Larousse, 1965 / Dictionnaire du Diable, Roland Villeneuve, Omnibus, 1998 / Dictionnaire du diable, des démons et sorciers, Pierre Ripert, Maxi-Poche Références, 2003 / Encyclopédie de la mythologie, Sequoia, 1962 / Grand dictionnaire des symboles et des mythes, Nadia Julien, Marabout, 1997.

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1 juillet 2010 4 01 /07 /juillet /2010 11:12

 

 

 

 

 

 

1. Déméter, la déesse des Moissons.

 

Déesse grecque des Moissons, de lAgriculture et, plus généralement, de la Fertilité, Déméter favorise la germination du blé, céréale sur laquelle reposait, pour une bonne part, léconomie hellénique. Les Grecs ont donc tout naturellement multiplié les légendes se rapportant à la déesse. Ainsi est-il dit que Déméter apprit aux hommes lart de semer et de labourer afin que prenne fin leur vie nomade. Voilà la raison pour laquelle Déméter est, de manière plus générale, considérée comme la déesse de la vie sociale organisée. Elle est le symbole de la civilisation antique dont elle assura lépanouissement socio-économique par labondance des récoltes.

 

2. La famille de Déméter.

 

Fille de Cronos et de Rhéa, petite-fille de Gaïa, Déméter est également la sœur de Zeus duquel, transformé pour loccasion en taureau, Déméter eut une fille nommée Perséphone (ou Coré, Proserpine dans la tradition romaine ; Perséphone fut également identifiée à Cérès). De lunion de Déméter et de Zeus naquit également un fils nommé Iacchos. Déméter sunit également à Poséidon : la déesse se changea en jument pour échapper au dieu, mais celui-ci se métamorphosa en cheval et parvint à la rejoindre. De cette union naquit le coursier Areion que lon représente muni dun pied humain et de la parole, ainsi quune fille nommée Despoena. Si lunion de Déméter avec Zeus et Poséidon fut imposée à la déesse, il est dit quelle sunit par contre librement au Titan Iason dans un champ trois fois labouré. De lunion de Déméter et de Iason devait naître Ploutos, le dieu de lAbondance. Rendu furieux par cette union, Zeus foudroya Iason.

 

3. Les attributs de Déméter.

 

Parmi les attributs de Déméter, on compte labeille, le myrte, le narcisse et la brionne (plante toxique grimpante également nommée « faux houblon » ; v. aussi Bryone dioïque). En outre, Déméter sétant rendue, en Attique, chez Phytalos, qui appartenait à la classe sacerdotale des Phytalides (de phytos : plante) voués au culte de la déesse, celle-ci lui donna lolivier (ou le figuier).

 

4. Déméter et le rapt de Perséphone.

 

Perséphone fut élevée par les nymphes. Alors quelle jouait avec elles et cueillait des fleurs dans la plaine dEleusis (Attique), elle aperçut soudain un beau narcisse dont elle entreprit de couper la tige. Cest alors quun bel homme aux yeux et aux cheveux sombres, monté sur un char attelé de chevaux noirs, lui apparut. Cétait Hadès, son oncle, qui, surgissant des Enfers, enleva la jeune déesse. Celle-ci poussa un cri déchirant qui alerta sa mère. Déméter quitta immédiatement lOlympe mais arriva trop tard pour empêcher Hadès dentraîner Perséphone dans le royaume des morts. Pendant neuf jours et neuf nuits, Déméter erra sur la Terre, une torche dans chaque main, à la recherche de sa fille. Au dixième jour, le dieu Hélios la prit en pitié et lui révéla le nom de son ravisseur. Déméter entra alors dans une grande colère et refusa de rejoindre lOlympe tant que sa fille ne lui serait pas rendue. Elle prit laspect dune vieille femme et se réfugia à Eleusis, une petite ville de lAttique sur le golfe du même nom. Là, elle se fit engager comme nourrice et fut bientôt très appréciée par Céléos et Métanira, les souverains de cette région. Afin de les remercier de leur hospitalité, Déméter voulut accorder limmortalité à leur fils Démophon. Pour ce faire, elle lui fit boire lambroisie, la boisson des dieux. Elle le souleva ensuite au-dessus du feu afin de « consumer son humanité », mais fut surprise à ce moment précis par Métanira qui fut particulièrement effrayée par ces pratiques magiques. Surprise par larrivée inopinée de la souveraine, Déméter lâcha Démophon dans le feu. Suite à cet incident, Déméter finit par enseigner lart de labourer, de semer et de moissonner les céréales à Triptolème, lautre fils du couple royal. Toutefois, depuis que Déméter avait quitté lOlympe, la Terre était devenue stérile et la famine, de même que les épidémies, menaçaient les mortels, à tel point que Zeus dût intervenir et exiger dHadès de rendre Perséphone à sa mère. Ensuite, il confia à Hermès le soin daller la rechercher. Hélas, Perséphone ayant commis limprudence de mordre dans une grenade (ou un grain de grenade), au cours de son séjour chez les Morts (déjà le péché originel !), ce qui dun point de vue magique lui interdisait tout retour parmi les vivants, Hadès refusa de la libérer. Un compromis put finalement être trouvé : Perséphone reçut lautorisation de passer neuf mois de lannée dans lOlympe mais elle devrait rester les trois autres mois dans les Enfers (dautres sources évoquent deux périodes égales de six mois). A la première période de la vie annuelle de Perséphone, celle de neuf mois, correspond lépoque où les jeunes pousses, à linstar de Perséphone (qui rejoint alors lOlympe) elle-même, sortent de la terre sous la protection de Déméter. La seconde période correspond aux semailles des grains de blés enfouis, tout comme Perséphone, qui a à ce moment regagné le domaine infernal souterrain. Toutefois, les mystères dEleusis ne se contentaient pas de cette explication agricole et voyaient également dans ce mythe un symbole du cycle perpétuel de mort et de résurrection.

 

5. Les mystères dEleusis.

 

Même si les lieux où lon assura avoir accueilli la déesse Déméter lorsquelle était à la recherche de sa fille, sont nombreux, cest à Eleusis que simplanta le sanctuaire le plus important dédié à Déméter et à Perséphone, et où se développa le culte particulier dits des « mystères dEleusis », réservé aux seuls initiés. Un chemin long de 22 km relia Athènes à Eleusis. Les Athéniens le nommèrent la « route sacrée » et prirent part au culte dEleusis dès le 7e siècle avant lère chrétienne. En lhonneur de Déméter qui avait appris à Triptolème lart de lagriculture, on célébra la fête dite des Thesmosphories, à laquelle correspondait la période de la sortie du blé des silos, où il avait été placé après le battage, jusquà ce quen octobre, le moment des semailles soit venu. Cette fête était célébrée dans de nombreux pays grecs, en novembre, après les récoltes de lannée et les semailles dhiver. Célébrées, à lorigine, en hiver, ces fêtes devinrent, dès 650 / -600, des mystères réservés aux seuls initiés. Ces mystères, nommés Eleusina, se divisaient en Petites et Grandes Eleusines. Les premières marquaient le retour de Perséphone, en février, ce qui rejoint le mythe de la résurrection et correspond à linitiation du premier degré. Les néophytes se livraient, à cette occasion, à des purifications et à des pratiques ascétiques. On les entretenait des révélations qui leur seraient faites ultérieurement. Les Grandes Eleusines, quant à elles, se déroulaient tous les cinq ans à Eleusis qui passait alors pour le centre de lagriculture- et à Athènes, au mois de septembre, passées les chaleurs dété. Cest alors que les adeptes obtenaient de la déesse, la révélation du mystère de la vie et de la mort. Cétait le couronnement de la grande initiation. Les aspirants, précédés de la statue de Iacchos, formaient une procession et empruntaient la « voie sacrée » séparant Athènes dEleusis, afin daccompagner les reliques de Déméter et de Perséphone. Pendant toute la durée des célébrations, labstinence et la chasteté étaient obligatoires. La fête se clôturait toutefois par des danses et un banquet.

 

6. Visualisation.

 

Déméter est généralement représentée dans la statuaire sous lapparence dune femme vêtue et digne. Elle est aussi parfois représentée assise sur un trône (Déméter de Cnide, 4e s. avant lère chrétienne) ou encore, couronnée dépis, une torche dans la main droite et une gerbe dépis dans la main gauche.

 

 

Eric TIMMERMANS.

Bruxelles, le 1er juillet 2010.

 

 

Sources : Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Joël Schmidt, Larousse, 1965 / Dictionnaire de la mythologie grecque et latine, Odile Gandon, Livre de Poche, 1996 / Encyclopédie de la mythologie, Sequoia, 1962 / Grand dictionnaire des symboles et des mythes, Nadia Julien, Marabout, 1998.

 

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