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SHIVA MAHADEVA, LE SEIGNEUR DE L’UNIVERS (1ère partie)

 

 

1. Shiva, la Réalité Ultime.

 

Shiva est un aspect du Dieu Suprême, de lEsprit Eternel, de la Réalité Ultime, de lImmuable. Shiva est le Soi véritable et absolu au-delà de tout concept, de toute analyse. Il est la source créatrice en sommeil. Sa demeure et sa forme primordiale se nomment Arunâchala (=montagne sacrée de feu, du sud de lInde). Shaïvam est le principe de Shiva.

 

Shiva serait un dieu pré-hindou, le plus ancien de lInde, tout particulièrement sous son aspect de dieu de la Mort et de la Destruction. Shiva est toutefois inconnu des Veda. Il sera tardivement assimilé à une forme du dieu Rudra, ce dernier étant aussi associé aux souffles vitaux qui sont les compagnons de Shiva. Certains noms appliqués auparavant à Rudra, le furent ensuite à Shiva, tel que Hara, Shamkara ou Mahâdeva. Tout comme Shiva, Rudra est tout à la fois un Guérisseur et un Destructeur.

 

Les trois phases cosmogoniques de la Création sont le Jaillissement, la Durée et la Dissolution de l’univers des formes (on peut également évoquer les Trois Mondes : le Ciel l’Espace et la Terre sur lesquels, ceci dit pour l’anecdote, le démon Hiranyakashipu obtint de Shiva la souveraineté). A chacune de ces phases correspond une divinité : Brahma le Créateur, Vishnu le Continuateur et Shiva le Destructeur. Ces trois divinités sont réunies dans une trimurti (ou triade).

 

Mais si Brahma est peu vénéré, Vishnu et Shiva constituent aujourd’hui les deux principales divinités –parfois concurrentes- de la tradition hindoue, à tel point que l’on dit que tant Shiva que Vishnu ont absorbé, au cours du temps, les trois phases cosmogoniques précitées qui rythment le devenir de la Création. On dit aussi dans le Hari Vamsha (=Généalogie de Hari) que cette trimurti, cette trinité brahmanique, est réunie en une seule divinité nommée Dattatreya. L’on évoque également une divinité nommée Harihara dont Vishnu (Hari) compose la moitié gauche et Shiva (Hara), la moitié droite.

 

Parfois fusionnées, les grandes divinités hindoues sont aussi parfois concurrentes. Ainsi est-il dit que Shiva aurait coupé la tête de Brahma pour le punir d’avoir triché et que c’est depuis ce jour que Brahma possède quatre visages. Ou encore que le démon Bana, protégé de Shiva, enleva un jour Aniruddha, un petit-fils de Krishna (lui-même avatar de Vishnu). Mais ce dernier affronta le démon au cours d’un combat qui ébranla l’univers entier, et ce jusqu’à ce que Shiva reconnaisse que, tout comme lui-même, Krishna procédait de la plus haute divinité. De nombreux récits de facture vishnouite ou shivaite, ridiculisent ou, au contraire, vantent les mérites de telle ou telle divinité par rapport aux autres.

 

Dans le contexte de la trimurti, Shiva est donc le Destructeur, mais dans le sens où il détruit pour favoriser le Renouveau. Shiva présidera à la dissolution de l’Univers afin de permettre sa régénération. Cela explique que Shiva est très souvent représenté par un lingam, symbole phallique qui représente l’énergie sexuelle et la pérennité de la Création, énergie qui doit être impérativement contrôlée par l’aspirant spirituel. L’aspect destructeur de Shiva est aussi une allusion à l’action divine purificatrice qui détruit l’ego en l’homme, afin de permettre à sa nature divine de se manifester.

 

Il convient dès lors de ne pas confondre le rôle destructeur de Shiva avec une quelconque malfaisance, que du contraire : son action est salvatrice. Shiva, que l’on dit volontiers ami des démons et des mauvais garçons (ce qui peut correspondre à son rôle de destructeur) n’en n’est donc pas moins une divinité bienveillante, bienfaisante, propice, salutaire, Shivam (=bonté, favorable, de bon augure).

 

Ainsi, les trois villes d’or, d’argent et de fer nommées Tripurâri et créée par Maya pour les démons, furent brûlées par Shiva, avec leurs occupants, à la demande des dieux. Ces trois villes symbolisent les trois Gunas qui gardent l’homme lié au monde de l’existence.

 

Quant à la danse cosmique de Shiva, Tandava, elle est à la fois symbole de vie et de mort. Chaque pas de la danse de Shiva a une signification bien précise. Une énergie cosmique émane de sa danse tourbillonnante et de son tambour à boules. Le son quémet ce tambour pendant que Shiva effectue sa danse cosmique est nommé Dim.

 

Les Grecs ont, eux, voulu assimiler Shiva à Dionysos, ce qui est peut-être un peu réducteur.

 

Sivoham signifie « Je suis Shiva ».

 

2. Visualisation et attributs.

 

2.1. L’Un, indivisible et immuable.

 

Shiva, un aspect de l’Un, comme nous venons de le voir, réunit les contraires. Si on le représente les yeux mi-clos cest parce quil les ouvre lors de la création du monde et les ferme pour mettre fin à lunivers et permettre le commencement d’un nouveau cycle. Shiva est ainsi le Maître du Temps (=Mahakala), raison pour laquelle on le représente portant une guirlande de crânes.

Trident de Shiva

 

2.2. Un dieu-ascète.

 

On insiste généralement sur son aspect ascétique : Shiva est le patron des ascètes. Selon la légende, cest au sommet du mont Kailasa que Shiva médite. Mais il y est parfois dérangé ! Ainsi, un jour, fou dorgueil, Ravana secoua cette montagne, semant la panique parmi les ascètes et les animaux. Une autre fois, c’est le dieu de l’amour Kama qui vint déranger sa méditation, et ce dans le but de faire se rencontrer Shiva et la déesse Parvatî. Shiva apprécia bien peu cette initiative de Kama que de son Troisième Œil, symbole de la Connaissance absolue, il le foudroya. A noter que c’est justement parce que cet œil possède des capacités foudroyantes que Shiva le tient généralement fermé. Quoiqu’il en soit, suite à cet événement, Shiva senduisit des cendres de Kama. Il fut ainsi le premier à prendre un bain de cendres, celui-ci étant depuis considéré comme une marque de lascète et est supposé conférer des pouvoirs spirituels. Voilà pourquoi on représente généralement Shiva, sombre ou bleu, c’est-à-dire couvert de cendres. Tapas désigne la chaleur ou l’ardeur ascétique de Shiva, en tant qu’Ascète Suprême. Grâce à cette « ardeur ascétique », Shiva préserve l’Univers. Tapas est aussi une sorte d’explosion psychique conduisant à la création de l’Univers, dans le cas des dieux et, dans le cas des humains, à l’acquisition de pouvoirs tels que même les dieux tremblent devant eux.

 

2.3. Le Gange pour coiffure.

 

Il porte également les cheveux tressés en nattes formant un chignon. Dans sa chevelure on trouve un croissant de lune (symbole du cycle du temps) qui est le dieu-lune, Chandra Kutila. Cest de cette chevelure que sécoula le Gange (il sagirait, plus précisément, du torrent de lAlaknandâ), personnifié par la déesse Gangâ. Mais on dit également quil amortit avec sa tête la chute du Gange mystique. Cest à la demande de Bhagîratha que Shiva accepta de recueillir les eaux du fleuve céleste dans ses cheveux afin quelles ninondent pas trop brutalement la terre. Le fleuve, irrité, voulut alors emporter Shiva dans le Pâtâla, mais le dieu fut le plus fort et il retînt les eaux dans les boucles de sa chevelure, ne les laissant sécouler que lentement, après quelles eurent fait le tour du mont Meru et se furent divisées en sept rivières. Voilà pourquoi Shiva est parfois représenté avec les eaux du Gange emprisonnées dans ses cheveux et voilà pourquoi on le nomme Gangâdhara (=Orné du Gange). Ainsi dit-on aussi que, fatigué de posséder trois femmes jalouses, Vishnu décida de ne garder que Lakshmî (dont on dit parfois qu’elle est la fille de Shiva et de Parvatî), de donner Sarasvatî à Brahma et Gangâ à Shiva. Il est dit, en outre, que Shiva donnera à ceux qui se seront purifiés dans le Gange ou encore à ceux dont les cendres y auront été immergées, la formule qui les libèrera définitivement du cycle infernal des renaissances (Samsara).

 

2.4. La peau du fauve.

 

Shiva est généralement vêtu dune simple peau de fauve ou est représenté assis sur une peau de tigre. La peau de fauve représente lénergie potentielle ou lempire des sens vaincu par Shiva. Shiva a fait des principes spirituellement nuisibles, représentés par les serpents et les scorpions qui lentourent, des serviteurs qui le parent.

 

2.5. Le « dieu-au-cou-bleu ».

 

Lors du Barattage de lOcéan, Shiva avala le poison Kâlakûta (ou Hâlâhala) qui menaçait les Trois Mondes et celui-ci se concentra en une tache bleue sombre qui marqua ainsi le dieu quon appela désormais Nîlakantha ou dieu-au-cou-bleu.

 

2.6. Les attributs de Shiva.

 

2.6.1. Parmi les attributs de Shiva, on trouve le taureau Nandi. Monture de Shiva et de Parvatî, ce taureau représente la force vitale que Shiva a su dompter ; Nandi est d’ailleurs aussi l’un des aspects de Shiva lui-même (en tant que « personnalité libre du corps », Shiva est nommé « nandîsvara »). Le nom de Nandi signifie « heureux » et il est dit qu’il apporte la joie. Nandi est, en outre, le protecteur de tous les mammifères. A noter aussi que l’on désigne les vaches divines du nom de « nandinî ».

 

2.6.2. On compte d’autres attributs et animaux liés à Shiva : lantilope, le cobra, le scorpion, le trishula (trident qui a été façonné dans les rayons de Sûrya, le dieu Soleil) ou encore pinâka (larme céleste), un vase à eau, un rosaire, une flamme, un croissant de lune (qui orne son chignon), une hache magique, des crânes, son arc (Shiva Dhanhu), linstrument de percussion nommé Damaru ou Damara (tambour en forme de sablier dont Shiva joue alors qu’il exécute la danse cosmique Tândava ; cet attribut représente le principe du son originel responsable de la création et de l’évolution future), larbre Bilva, qui lui est sacré.

 

Lingam

 

 

 

2.6.3. Parmi tous les attributs de Shiva, celui qui le symbolise le mieux est le lingam ou Shivalingam. C’est la forme sous laquelle Shiva est le plus souvent représenté dans les temples qui lui sont consacrés. Il sagit dun cylindre ovoïde, symbole phallique et symbole de l’infinitude divine, caractéristique des temples shivaïtes. Il représente laspect impersonnel du dieu et symbolise la fusion de la forme dans lAbsolu. Sa forme ovale représente ce qui na ni début, ni fin, et qui se fond dans l’infini. Il est un aspect de l’œuf cosmique. Plus précisément, il est la forme du sans-forme, le symbole de l’Absolu, là où toute la Création disparaîtra et se fondra un jour où l’autre. Le lingam est aussi le symbole du pouvoir créateur de Shiva. Le lingam exprime aussi l’idée de fertilité et de prospérité, d’autant mieux qu’il s’encastre dans la yoni ou « matrice », représentant une vulve stylisée. Selon le point de vue shivaïte, il évoque la colonne sans base ni sommet d’où Shiva jaillit un jour pour affirmer à Brahma et à Vishnu, sa supériorité sur eux (Lingodbhava signifie l’« émergence du lingam »). Mais le lingam peut aussi être tripartite et constituer une évocation concrète de la trimurti : sa section carrée à la base est Brahma, sa section médiane octogonale est Vishnu, sa section supérieure circulaire est Shiva. Il est dit encore que le terme Caturmukhalingam désigne le phallus de Shiva aux Quatre Visages. De catur (quatre), mukha (visage) et linga (le phallus de Shiva). Il existe également ce que l’on nomme des « jyotirlingam » ou « lingam de lumière ». Ainsi « jyotis » signifie-t-il la « Lumière », la « Splendeur », la « Clarté », l’ « Eclat », la « Lumière spirituelle ». L’un des douze plus célèbres jyotirlingam est à Kedarnâth.

 

3. La shakti de Shiva.

 

3.1. La shakti est un terme sanskrit qui signifie « puissance », « force », « pouvoir » et, par extension, la « puissance de procréation », l’« énergie dynamique féminine » ou le « principe féminin actif » qui anime les divinités hindoues, le principe mâle étant considéré comme passif dans son essence. La shakti de Shiva (ou Icchâ Shakti) est représentée par l’un des multiples aspects de la Grande Déesse. Dans le cas de Shiva, il s’agit essentiellement de Parvatî, la Fille de l’Himalaya (ou la Fille de la Montagne). La shakti de Shiva peut toutefois être vénérée sous de multiples noms correspondants aux innombrables aspects de Devi, « la Déesse aux Mille Noms » : Kâlî, Durgâ, Gauri (qui effectua une longue pénitence afin de devenir l’épouse de Shiva)…

 

3.2. On peut également évoquer la déesse Kanya Kumari qui a donné son nom au cap Comorin (extrême-sud de l’Inde) ; Kanya Kumari (la Demoiselle Vierge) y représente l’éternelle fiancée de Shiva qui réside dans le grand temple voisin de Suchindram.

 

3.3. On peut aussi citer la déesse Minakshi dont un festival grandiose célèbre chaque année à Madurai, en Inde du sud, le mariage avec Shiva Sundareshvara (=Dieu de la Beauté).

 

3.4. Mais Shiva fut aussi aimé de Satî, la fille de Daksha. Lorsqu’elle apprit que son père avait refusé d’inviter Shiva à une assemblée à laquelle avaient été invitées toutes les créatures vivantes, des dieux aux insectes, elle en mourut. Lorsqu’il fut informé de ce tragique événement, Shiva entra dans une violente colère, détruisit les préparatifs de la cérémonie et molesta gravement plusieurs dieux ! Seule, dit-on, la sagesse de Brahma parvint à le calmer. La perte de Satî fut toutefois pour Shiva une perte inguérissable.

 

3.5. On dit aussi que Durgâ, la tueuse de démons et l’un des aspects de la shakti de Shiva, qu’elle naquit de la colère cristallisée de Shiva et de Vishnu. De fait, Durgâ apparaît comme un aspect terrible de la shakti, comme Parvatî en est un aspect bienveillant. Durant son combat contre les démons, Durgâ possédait dans son armement, le trident de Shiva.

 

3.8. Il est dit que Sita avait le vœu de n’épouser que celui qui serait capable de tendre la corde de l’arc de Shiva. Râma y parvint et fit même mieux puisque, dit-on, il brisa l’arc en deux. Cette légende est, de toute évidence, de facture vishnouite, Râma étant un avatar de Vishnu.

 

3.7. Lorsque Parvatî se présenta à Shiva, celui-ci, dit-on, se moqua de la peau sombre de la déesse, tant et si bien que Parvatî décida de se retirer dans la forêt et de s’y livrer à une sévère ascèse qui lui permit d’acquérir un teint doré (à noter que selon une certaine tradition, l’aspect sombre, obscur, de Parvatî, correspond à Kâlî). C’est durant cette ascèse que Shiva, déguisé en brahmane, vint à son tour la tenter, mais la déesse ne céda guère. Alors le dieu, impressionné par tant de force spirituelle, demanda sa main. Elle devint Mahavidya (=Suprême Connaissance), capable daccomplir avec Shiva la grande danse cosmique de la libération spirituelle, Urdhva Tandava. Nombre de récits évoquent la vie du couple divin Shiva et Parvatî. Ainsi, Parvatî posa-t-elle un jour les mains sur les yeux de son époux et cest ainsi que lunivers bascula dans lobscurité. Shiva, irrité, dévoila alors son Troisième Oeil. On dit aussi que le séjour privé de Shiva et de Parvatî est le sommet du mont Kailash (ou Kailâsa, ou Gang Rinpoché), le plus haut sommet (6714 m) d’une chaîne de montagnes du même nom. Les enfants du couple divin portent les noms de Skanda et de Ganesh (le dieu à tête d’éléphant ; à noter qu’il est dit que les guerriers du dieu Shiva sont les Ganas et que Ganesh est leur maître et seigneur), toutefois, ni l’un ni l’autre ne sont nés de l’union de Shiva et de Parvatî, le premier étant issu de Shiva et le second ayant été façonné par Parvatî.

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