1. La genèse d’Hermès.
Fruit du viol de la nymphe Maïa par Zeus, Hermès naquit dans une caverne du mont Cyllène, en Arcadie. Atlas est son grand-père, Maïa étant une des sept filles de ce Titan, immortalisées sous la forme de la constellation de la Pléiade. Il semble que le mythe de la naissance d’Hermès ait pour origine un culte de la fertilité préhellénique des phallus de pierre, Hermès étant la force résidant dans la pierre phallique et Maïa représentant la Déesse-Mère sous son aspect de Vieille Femme (Nadia Julien). Très tôt, Hermès manifesta des qualités extraordinaires d’intelligence et de ruse. Encore nouveau-né, il parvint à quitter son berceau et à s’enfuir en Thessalie où il s’empara des bœufs et des génisses aux cornes d’or qui avaient été confiés à Apollon par le roi Admète. Après avoir sacrifié un (ou deux) bœufs aux douze dieux de l’Olympe (dont lui-même !), le jeune Hermès revint à sa caverne natale, non sans avoir pris la peine de faire marcher le troupeau à reculons (ou chaussée de sandales en écorce de chêne) afin que l’on puisse retrouver sa trace. En outre, sur le chemin, il heurta une écaille de tortue qui traînait sur le sol et tendit dessus les nerfs du bœuf sacrifié : c’est ainsi qu’Hermès inventa la lyre. Sur ces entrefaits, Apollon avait réussi à rejoindre Hermès qui, de retour dans les langes maternels, faisait mine de ne rien savoir… Après s’être brièvement mis en colère, Apollon fut bien vite charmé par les sons qui s’échappaient du nouvel instrument de musique inventé par le jeune dieu et c’est ainsi que les deux dieux devinrent amis. Apollon donna sa houlette de berger qui, transformée, devint le célèbre caducée, l’attribut principal d’Hermès. A ce propos, il est dit qu’un jour, Hermès se promenant, vit deux serpents se disputer une proie. Il glissa sa houlette entre les deux reptiles qui aussitôt s’enroulèrent autour. Ainsi naquit le caducée, cet attribut d’Hermès qui plus tard devint un symbole de la médecine. D’autres sources prétendent cependant que le caducée était, à l’origine, une houlette dotée de trois cordons blancs qui furent ensuite confondus avec des serpents. Quoiqu’il en soit, c’est ainsi qu’Hermès devint le héraut officiel des dieux.
2. Hermès, une dieu aux fonctions multiples.
Traditionnellement, Hermès est le dieu grec des Marchands et des Voyageurs. A Rome, il a pour équivalent Mercure. Dans le domaine celtique, les Romains lui assimilèrent le dieu Lugos/Lugh/Lleu et le dieu Odin/Wotan dans le domaine germano-nordique. Mais les Grecs vénéraient également Hermès en tant que patron des orateurs et comme inventeur de l’alphabet (inventeur de l’écriture, il est dit qu’Hermès composa l’alphabet avec l’aide des trois Parques), de la musique, de l’astronomie, des poids et des mesures, de la culture de l’olivier, de même que de la gymnastique. Hermès apparaît aussi comme un pourvoyeur de dons, notamment ceux que l’éloquance et de la persuasion, ce qui n’est pas sans le rapprocher du dieu celtique Oghma/Ogmios. On lui attribue, en outre, l’invention de la méthode de divination et de prédiction à l’aide d’osselets. Ce sont les Thries du Parnasse qui lui enseignèrent l’art de la divination en lançant des cailloux dans une bassine, méthode qui était pratiquée à Delphes. En règle générale, Hermès est donc perçu comme le dieu qui patronne tout ce qui requiert de l’habileté et de la ruse, ce pourquoi il est également le dieu des voleurs et des tricheurs. Il a d’ailleurs lui-même la réputation d’être chapardeur ! Ainsi vole-t-il l’arc d’Eros, le trident de Poséidon, l’épée d’Arès, les tenailles d’Héphaïstos, la ceinture d’Aphrodite et même le sceptre de Zeus ! Protecteur des voyageurs et des marchands, Hermès, qui veille à la sécurité publique sur les voies, les places et les chaussées, était le véritable « ami divin » de tous les Grecs. Ainsi, chaque aubaine, chaque occasion positive, lui était attribuée. Hermès est aussi et surtout un dieu psychopompe, celui qui guide les âmes des morts. Sous cet aspect, il est connu sous le nom de Psychopompos.
3. Les noms d’Hermès.
3.1.Agetor.
3.2.Agoraios (=Protecteur des marchés).
3.3.Argeiphontès (=Plein d’éclat).
3.4.Criophoros (en tant que dieu des pâtres).
3.5.Enagios (lorsqu’il accorde le succès lors de concours).
3.6.Enodios (lorsque Hermès veille sur les carrefours).
3.7.Hégémonios.
3.8.Kadmilos (lorsqu’il préside aux sacrifices).
3.9.Logios (lorsque Hermès accorde l’éloquence).
3.10.Nomios.
3.11.Psychopompos (=Guide des âmes des morts). Sous cet Aspect, Hermès fut assimilé au dieu égyptien Anubis, avec lequel il foremera même une divinité syncrétique : Hermanubis.
3.12.Trismégistos (=Trois Fois Grand).
4. Le culte d’Hermès.
4.1.D’Arcadie, le culte d’Hermès se répandit dans toute la Grèce.
4.2.On connaissait un oracle d’Hermès, en Achaïe, alors qu’on avait institué à Délos, Rhodes et Cos, des corporations de marchands nommées hermaistes.
4.3.En guise d’offrandes, on donnait à Hermès du petit bétail, de l’encens et du miel. On lui offrait également des langes de veaux, symboles de l’éloquence.
4.4.En l’honneur d’Hermès, on célébrait les hermaïa, fêtes des gymnases qui incluaient, notamment, des sacrifices de gallinacés ou encore, de jeunes bovins.
5. La descendance d’Hermès.
De l’union d’Hermès et de la déesse Aphrodite, naquit Hermaphrodite. Mais Hermès possède une nombreuse descendance résultant de son union avec des nymphes : Autolycos, qu’il eut de Chioné et qui n’est autre que le grand-père d’Ulysse ; Daphnis, qu’il eut d’une Naïade ; Céphalos et Céryx, nés du viol de Hersé ; Polydoros, né de l’union d’Hermès avec Polymélé. Mais Hermès s’unit également à des mortelles, telles qu’Acacallis, fille de Minos et de Pasiphaé.
6. La guerre de Troie.
C’est Hermès qui placera les trois déesses, Aphrodite, Athéna et Héra, en présence de Pâris qui devra juger de leur beauté, jugement qui durant la guerre de Troie verra Aphrodite, gagante du concours, se ranger aux côtés des Troyens, alors que les deux autres déesses, délaissées, se vengèrent en soutenant les Grecs, par haine de Pâris. Toujours durant la guerre de Troie, Zeus chargea Hermès d’amener Priam, le roi de Troie, réclamer le corps de son fils Hector à Achille. Hermès accomplit sa mission de nuit, grâce à sa capacité à se déplacer aisément dans l’obscurité, et ce afin de cacher aux Grecs la présence du roi Priam dans leur camp.
7. Hermès, protecteur d’Ulysse.
Dans l’Odyssée, on voit Hermès voler plus d’une fois au secours d’Ulysse, notamment lorsque Circé changea ses hommes en pourceaux. Dans le même récit, c’est également Hermès qui convaincra Calypso de laisser Ulysse repartir : « Pourquoi je suis venu, moi, dieu, chez toi, déesse ? Je m’en vais franchement te le dire : à tes ordres. C’est Zeus qui m’obligea de venir jusqu’içi, contre ma volonté : qui mettrait son plaisir à courir cette immensité de l’onde amère ? Et dans ton voisinage, il n’est pas une ville dont le peuple offre aux dieux, en un beau sacrifice, l’hécatombe de choix ! Mais quand le Zeus qui tient l’égide a décidé, quel moyen pour un dieu de marcher à l’encontre ou de se dérober ?… Zeus prétend qu’un héros est ici, près de toi, et le plus lamentable de tous ceux qui, sous la grande ville de Priam, étaient allés combattre. Aujourd’hui, sans retard il faut le renvoyer : c’est Zeus qui te l’ordonne ; car son destin n’est pas de mourir en cette île, éloigné de ses proches. » (Odyssée, chant V).
8. Visualisation.
On représente souvent Hermès coiffé d’un chapeau de voyageur ou d’un casque ailé. Ainsi le trouve-t-on sur des vases grecs, coiffé d’un pétase, chapeau plat à large bord, et chaussé de sandales ailées. Il tient à la main le sceptre de héraut (=caducée). Hermès est vêtu d’un manteau et, à ses talons, sont attachées des ailettes. Dans l’art ancien, Hermès était représenté sous l’aspect d’un homme fort et barbu et ce n’est qu’ultérieurement qu’on devait le représenter sous les traits d’un jeune homme fort et vigoureux, au regard intelligent et aimable. Des statues d’Hermès furent élevées aux carrefours et sur les bords des routes, car sa présence rassurait le voyageur et soutenait dans son labeur le marchand ambulant, le dieu ayant la réputation d’écarter d’eux les périls de la route et les mauvaises rencontres. Ainsi donnait-on le nom d’hermès à des piliers relativement hauts, s’amenuisant vers la base et surmonté d’un buste du dieu (ou d’une autre divinité ou encore de l’effigie d’un ancêtre disparu, comme en témoignent les hermès trouvés dans les villas de Pompéi et d’Herculanum dont la poitrine, les épaules et les bras sont coupés par des plans verticaux). On trouvait les hermès dans les rues et les places publiques des villes grecques. Ces monuments furent également utilisés comme bornes frontières. Notons encore qu’à l’origine, une pierre rectangulaire était dédiée à Hermès comme sa représentation ou sa demeure.
Eric TIMMERMANS.
Bruxelles, le 16 mars 2011.
Sources : Dictionnaire de la mythologie grecque et latine, Odile Gandon, Livre de Poche, 1996 / Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Joël Schmidt, Larousse, 1965 / Encyclopédie de la mythologie, Sequoia, 1962 / Grand dictionnaire des symboles et des mythes, Nadia Julien, Marabout, 1998 / L’Odyssée, Homère, traduit et présenté par Victor Bérard, Livre de Poche, 1984.