1. Les Dioscures sur la voie de la divinisation.
Les Dioscures (=fils de Zeus ; en grec : Dioskouroi), natifs de Sparte, portent les noms de Castor (= « Eclatant ») et de Polydeucès/Polydeicos (= « Très Brillant » ; Pollux, en latin). Leur mère est Léda, mais ils sont de pères différents : Castor est le fils de Tyndare (raison pour laquelle on appelle parfois les Dioscures, « Tyndarides »), époux de Léda, alors que Pollux est l’enfant de Zeus (qui s’était métamorphosé en cygne pour séduire Léda).
Plus précisément, Léda conçut deux œufs, dans chacun desquels il y avait un garçon et une fille : Castor et Clytemnestre (enfants de Tyndare), Pollux et Hélène (enfants de Zeus). Les Dioscures sont également appelés soteres (=Sauveurs), parce qu’ils apparaissent au moment crucial d’un combat ou lorsque la tempête fait rage.
Inséparables, les deux frères, élevés ensemble à Sparte, apparaissent dans un grand nombre d’aventures communes (expédition contre Athènes, chasse au sanglier de Calydon, expédition des Argonautes, quête de la Toison d’Or…). Il est dit que lors de l’expédition des Argonautes, Castor se fit remarquer par son art de l’équitation, alors que Pollux, lui, se distingua dans l’art de la lutte, en sortant victorieux d’un combat contre Amycos, le roi géant des Bébryces.
Toujours dans le cadre de cette expédition, les Dioscures fondèrent une ville en Colchide, sur la mer Noire : Dioscurias (ou Iskouriah, Isgaur, Sebastopolis), qui devint un grand centre commercial. C’est aussi durant l’aventure des Argonautes que les Dioscures seraient apparus sous la forme de feux (ou de moineaux, selon une autre version) au-dessus du bateau Argo, Zeus signifiant par là qu’il prenait le bateau et son équipage sous sa protection. A noter que ce phénomène lumineux, bien connu sous le nom de « feu de saint Elme », fut longtemps désigné par les noms de « Castor et Pollux ».
Lorsque Thésée enleva Hélène, encore toute jeune, pour l’emmener à Athènes, rivale de Sparte, Castor et Pollux levèrent une armée et envahirent l’Attique. Pendant l’absence de Thésée, qui s’était rendu aux Enfers, Castor et Pollux vinrent libérer Hélène pour la ramener à Sparte, de même qu’Ethra, la mère de Thésée, qu’ils prirent en otage.
Mais les Dioscures se livrèrent, eux aussi, au rapt de femmes et cela leur fut fatal. Ainsi enlevèrent-ils Phoïbê et Hilaera, provoquant la fureur de leurs fiancés, Idas et Lyncée, fils d’Apahée, qui poursuivirent Castor et Pollux, pour finalement tuer le premier et blesser le second. Selon une autre version (ou une version plus complète) de cette histoire, Castor et Pollux se seraient réconciliés avec Idas et Lyncée. Ils partirent ensemble, en Arcadie, mener une razzia de troupeaux. C’est Idas qui fut chargé de partager le butin entre les quatre chasseurs. Il décida de découper un bœuf en quatre et dit que le premier qui aurait terminé sa part, aurait une moitié, et le second, l’autre moitié. Idas dévora sa part, aida Lyncée à terminer la sienne, ainsi les deux frères purent-ils se proclamer propriétaires du troupeau qu’ils emmenèrent. Mais les Dioscures les suivirent et volèrent le troupeau pendant qu’Idas et Lyncée sacrifiaient à Poséidon sur le mont Taygète. Castor et Pollux se cachèrent ensuite dans un tronc d’arbre. Toutefois, Lyncée les ayant aperçus, plongea sa lance dans le tronc, tuant Castor et blessant grièvement Pollux. Ce dernier eut toutefois la force de tuer Lyncée d’un coup de lance. Pollux, fils de Zeus, était le seul des deux frères à bénéficier de l’immortalité et il fut enlevé dans les cieux par son père. Toutefois, ne pouvant se consoler de la disparition de Castor, Pollux demanda à Zeus de pouvoir partager son immortalité avec lui, un jour sur deux (un dans les Enfers et un dans l’Olympe), ce qui lui fut accordé.
Ultérieurement, le premier des dieux grecs plaça les Dioscures dans le ciel où ils formèrent désormais la constellation des Gémeaux. On peut également rapprocher les Dioscures des Ashvins de la tradition hindoue.
2. Le culte des Dioscures divinisés.
Le culte des Dioscures divinisés s’étendit bientôt de Sparte à toute la Grèce. De nombreux sanctuaires leur furent dédiés, principalement dans le Péloponnèse, notamment à Sparte et à Mantinée. Ce culte s’étendit, par la suite, à la Sicile et à la péninsule italique, régions dans lesquelles on en fit des dieux marins. Ils furent aussi les protecteurs des jeux gymniques et inspirèrent les chantres qui se faisaient entendre lors de ces festivités.
En relation avec le monde maritime, les Dioscures le sont également avec l’univers des chevaux, particulièrement à Rome. Ainsi dit-on que lors de la bataille de Regille, les Dioscures, montés sur des coursiers, permirent aux Romains de remporter la victoire sur les Italiques. En mémoire de l’aide qu’ils avaient apportée lors de cette bataille, les Dioscures étaient honorés le 8 avril par des fêtes que l’on nommait dioscuries. Le dictateur Albinus leur voua ensuite un culte sur le Forum, à Rome, en face du temple de Vesta. Par ailleurs, la classe équestre romaine considérait les Dioscures comme ses patrons, et leur fête était établie au 15 juillet. Le peuple de Rome contribua à immortaliser Castor et Pollux par l’usage de deux jurons : Edepol (« par Pollux ! ») et Ecastor (« par Castor ! »).
De manière générale, on vit dans les Dioscures les inventeurs de la danse et de la musique guerrières. Patrons des « bardes », ils étaient également considérés comme des dieux de l’Hospitalité, de la Longévité et de la Navigation.
3. Visualisation.
3.1. Les Dioscures sont généralement représentés sous l’aspect de jeunes héros, nus et imberbes. Ils sont aussi très souvent figurés en cavaliers, légèrement vêtus d’une tunique ou d’un chiton et montés sur des chevaux blancs. Ils portent parfois une étoile au front.
3.2. Les œuvres d’art représentent parfois les Dioscures main dans la main ou montrent leurs deux profils superposés (médaille).
3.3. Les statues des Dioscures situées devant le Quirinal, à Rome, et hautes de quatre mètres, sont célèbres.
3.4. Il est dit aussi que les Dioscures peuvent parfois apparaître sous la forme de feux. Ils apparurent sous cette forme au cours de la guerre du Péloponnèse et voltigèrent autour du gouvernail de Lysandre, afin de lui annoncer qu’ils lui apportaient leur protection. Il s’agirait là, en fait, d’un phénomène naturel bien connu sous le nom de « feux de Saint-Elme », le nom d’Elme lui-même n’étant peut-être que la déformation du nom d’Hélène, sœur des Dioscures.
3.5. Il semble qu’à l’origine les Dioscures étaient représentés de manière abstraite sous l’aspect de deux poutres parallèles assemblées par deux poutres transversales (c’était là l’emblème que les rois alliés emportaient à la guerre) ou encore, par deux amphores entrelacées de serpents.
Eric TIMMERMANS.©
Bruxelles, le 30 septembre 2010.
Sources : Dictionnaire de la mythologie grecque et latine, Odile Gandon, Hachette, 2000 / Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Joël Schmidt, Larousse, 1965 / Encyclopédie de la mythologie, Sequoia, 1962 / Grand dictionnaire des symboles et des mythes, Nadia Julien, Marabout, 1998.