1. Adonis-Adonaï, le Seigneur.
Le nom d’Adonis vient du phénicien adon, ce qui signifie « Seigneur » (cf. adonaï, en hébreu). Le mythe d’Adonis, divinité phénicienne, est originaire de Syrie. Il faut trouver son origine précise dans le port phénicien de Byblos (actuellement, Jubayl), sur l’embouchure du fleuve Adonis. Ce mythe parvint finalement en Grèce, non sans avoir subi quelques modifications, en Egypte et à Chypre.
2. Adonis, un démon ?
Une certaine tradition judéo-chrétienne semble avoir assimilé Adonis à un démon susceptible de provoquer des incendies. Ainsi est-il parfois rapproché de Thamuz (ou Thamnuz, Tammouz), une autre divinité démonisée : « Thamnuz : Tammouz, dieu sumérien de la végétation, blessé par un sanglier et pleuré par des femmes, fut appelé Adoni en hébreu (Ezéchiel, VIII, 14) et devint l’Adonis des Grecs. La boue rouge du fleuve Adonis était supposée être son sang. » (Le Paradis perdu, notes 26 en pages 356 et 357). Toujours dans le domaine démonologique, signalons aussi l’intervention totalement fantaisiste d’un certain démon « Adonisédech » qui, selon l’abbé Thorey, aurait, en 1866, possédé, avec une cohorte d’autres entités démoniaques, une dame du nom de Cantianille B. d’Auxerre.
3. Adonis dans la tradition hellénique.
Adonis est, dit-on, le fils d’un roi de Chypre, nommé Cinyras, et de Myrrha (ou Smyrna). Myrrha s’était fait passer pour la reine afin, en le trompant à l’aide de l’obscurité, de coucher avec son père, enivré au préalable par la propre nourrice de la fille incestueuse. Cette histoire n’est pas sans rappeler la légende biblique des filles de Loth couchant avec leur père après l’avoir enivré (Genèse 19 : 31-32). Myrrha sera finalement changée en arbre à myrrhe. Adonis est donc le fruit d’une union incestueuse. Il fut recueilli par Aphrodite, dont Chypre est l’île, et confié à Perséphone qui finit par s’éprendre du jeune homme, provoquant la jalousie d’Aphrodite. Mais l’amour que celle-ci portait à Adonis provoqua bientôt, aussi, la jalousie d’Arès (ou d’Apollon ou d’Artémis, selon les versions). Aussi, le dieu de la Guerre décida-t-il d’envoyer contre Adonis, un sanglier furieux qui le tua d’un coup de boutoir dans l’aine. Cet épisode rappelle, dans le contexte de la mythologie celtique d’Irlande, l’histoire de Grainné et Diarmaid, qui trouvera également la mort à l’occasion d’une chasse au sanglier. L’on peut également se référer à l’histoire de Tristan et Yseult. On dit que le sang d’Adonis se changea en anémone qui est la première et éphémère fleur du printemps. On dit aussi que le sang d’Aphrodite qui s’écoulait des écorchures qu’elle s’était fait en marchant parmi les ronces alors qu’elle recherchait Adonis, colora les roses blanches en rouge. En définitive, Zeus décida qu’Adonis séjournerait un tiers de l’année avec Perséphone, que pour un autre tiers il serait confié à Aphrodite et que pour le troisième tiers, il serait libre d’aller où bon lui semble. Selon une autre version du mythe, lorsqu’Adonis fut tué, sa compagne Salammbô parvint à le ressusciter, à l’instar d’Isis ressuscitant Osiris avec l’aide d’Anubis. On retrouve ici aussi une allégorie du rythme saisonnier et l’on pourrait évoquer, de même, l’histoire de Cybèle et d’Attis.
4. A savoir également.
4.1. Adonis symbolise le cycle de la végétation. En hiver, il descend dans le royaume d’Hadès rejoindre Perséphone. Au printemps, il revient sur terre, s’unir à Aphrodite, pour finalement, en été, s’épanouir et fructifier seul.
4.2. Théocrite a décrit les fêtes grandioses qui célébraient la tristesse de la mort et la joie de la résurrection d’Adonis à Alexandrie. Ces fêtes se déroulaient aussi dans d’autres villes. En Grèce, on célébrait les Adonies en l’honneur d’Adonis et ces festivités duraient huit jours. A Rome, c’est dans les jardins d’Adonis, situés au nord du Palatin, que les femmes venaient pleurer la mort d’Adonis.
4.3. Pour l’anecdote, ajoutons qu’une plante utilisée pour réduire l’hypertension artérielle, porte le nom d’Herbe d’Adonis, adonis vernalis.
5. Visualisation.
Les plus anciennes représentations d’Adonis connues apparaissent sur des miroirs étrusques, de même que sur des vases, montrant notamment Aphrodite et Perséphone se tenant près du cercueil d’Adonis. On connaît aussi une statue (Capoue, 4ème siècle avant l’ère chrétienne), de même que des peintures murales (Pompéi) et sur des peintures sur sarcophages romains, représentant Adonis.
Eric TIMMERMANS
Bruxelles, le 20 avril 2010.
Sources : Bible de Jérusalem, Cerf, 1998 / Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine, Joël Schmidt, Larousse, 1965 / Encyclopédie de la mythologie, Sequoia, 1962 / Dictionnaire du Diable, Roland Villeneuve, Omnibus, 1998 (p. 157) / Grand dictionnaire des symboles et des mythes, Nadia Julien, Marabout, 1998 / Héliogabale et le sacre du soleil, Robert Turcan, Albin Michel, 1985 / Le Paradis perdu, John Milton, NRF/Gallimard, 2007 / Le Prince de ce monde, Nahema-Nepthys et Anubis, Editions Savoir pour Être, 1993.